⎨ Stay with me a little longer I will wait for you, shadows creep and want grows stronger deeper than the truth. I can’t help but want oceans to part cause I’m overcome in this war of hearts.⎬ RUELLE.

Leurs regards se croisèrent de temps en temps, un regard qu'elle n'avait pas forcément rencontré tant de fois et qui pourtant avait su s'implanter dans sa mémoire. Il y avait quelque chose en lui qui l'intriguait, et Cora se surprenait à réussir à supporter la présence d'un sorcier. Elle n'aurait sans doute pas hésité à le tuer si ils s'étaient rencontrés quelques temps plus tôt, quelques temps qui faisaient bien la différence. Elle sourit à ses paroles et se risqua même un rire cynique quand il lui parla du fait que ce n'était pas dans ses habitudes de suivre les gens. Elle était plus qu'au courant de ses activités extérieures la gamine et pourtant cela ne la dérangeait pas, plus, c'était ça qui l'effrayait. « Disons qu'elle est plus supportable que ce que je pensais. » ajouta-t-elle, une pointe de taquinerie dans la voix. Azilis vint les frôler et Cora posa ses iris sur sa chevelure rousse qu'elle vit bientôt disparaitre dans la foule. Un nouveau soupire, il n'était plus rare de voir sa meilleure amie dans un tel état quand Thaddeus était dans les parages, malheureusement. Cain finit par les suivre et disparu en seulement quelques secondes, son regard se reposa de nouveau sur le sorcier, ils étaient seuls, une nouvelle fois. « En effet, je crois bien qu'il s'agit du destin. » elle but une gorgée de bière pleine qu'elle venait de récupérer sur un plateau tout en affichant un sourire sur ses joues gonflées. Mais un cri vint interrompre les festivités, un cri strident, effrayant, un cri qui vint donner la chaire de poule à la chasseuse. Elle se retourna en direction de la provenance du son et ses iris s'agitèrent pour essayer d'en trouver la source, en vain. Le silence avait pris possession de la foule, des personnes présentes, un silence de mort pesait sur la place. Cora sentait le souffle coincé dans sa poitrine et le bout de ses doigts vint caresser la dague qu'elle gardait dissimulée dans son dos. Un nouveau cri, tout aussi strident, effrayant. Les yeux de Nolan et de Cora se croisent le temps d'une seconde, il n'était pas au courant, il semblait tout aussi perdu qu'elle, ce n'était donc pas les sorciers qui étaient la source de cet agitation. La foule commença à s'agiter et les cris se dispersèrent au fur et à mesure où les secondes défilèrent. Cora saisit sa dague à pleine main tandis que ses pupilles cherchèrent désespérément une cible à attaquer. Elle voulut essayer de trouver Cilian, puis Azilis, toute autre figure familière pour s'assurer qu'ils étaient sains et saufs mais tout semblait s'être évanouit dans la foule qui s'agitait dans tous les sens, bercée par les cris stridents. Elle sentit des doigts s'enrouler dans les siens tandis qu'elle vit la main de Nolan serrer la sienne, ses lèvres s'ouvrirent et malgré le bruit qui s'échappait de la foule elle comprit ce qu'il lui disait; ils devaient s'enfuir le plus rapidement possible. Un hochement de tête suffit et ils s'élancèrent tous les deux en direction de l'opposé de la menace. Le coeur de Cora semblait battre plus fort que jamais contre sa poitrine, ses yeux écarquillés cherchaient en vain une cible pour se défendre bien que la peur semblait s'être éprise de tout son être. Une peur qu'elle n'avait jamais ressentit auparavant, parce qu'elle avait peur de l'inconnu Cora. « Mais merde qu'est-ce qu'il se passe? » ajouta-t-elle tandis qu'ils se cognaient contre diverses personnes toutes aussi effrayées qu'eux alors qu'ils essayaient vainement de se frayer un chemin dans la foule.

Thad avait fini par disparaître de son champ de vision. Ce n'était pas plus mal, surtout dans cette situation, où les sentiments du chasseur étaient purement et simplement entrain de l'écarteler. Autant dire qu'il ne sera plus aussi joyeux pendant les fêtes après ça. Les actions continuaient de s’enchaîner, pendant qu'il restait là, planter comme un piquet. Il n'était pas fou, il le voyait aux réponses des personnes, plus de la moitié des habitants présents n'étaient pas de simple humain, si même eux se mettaient à fuir, ça ne présageait rien de bon. À cet instant, il se maudissait, d'avoir englouti autant de bière et surtout de n'avoir rien sur lui, qui aurait pu penser qu'une attaque aurait lieu en ce jour. En ce jour de la Saint Patrick. Désorienté, il essayait de comprendre, de remettre ses idées en place, ce qui était loin d'être facile. Il ignorait ce à quoi il avait à faire, mais il pouvait les voir désormais, la foule qui continuait à fuir, un roncier qui se dressait. Commençant à faire le vide, c'était la meilleure chose qui lui restait à faire, à trop réfléchir il allait finir par rester s'enraciner dans le sol. Malheureusement, bien rapidement une main était venu lui attraper le bras, pris par l'effet de surprise il avait suivi l'attraction de la main, le regard plongé dans celui de la rouquine. Grimaçant légèrement à sa première question, il n'avait rien emmené avec lui, où est-ce qu'il aurait pu cacher une quelconque arme ? Pas le temps de répondre, qu'elle repose une autre question, alors que les yeux du chasseur se posent sur le sorcier. Pourquoi il ne l'avait pas emmené loin d'ici ? Pourquoi ils n'étaient pas partis ? Hochant simplement la tête en guise de réponse, il laissait ses yeux voguer entre la chasseuse et le sorcier. Il ne le dira pas à haute voix, mais il se faisait autant de soucis pour Thaddeus que pour Azilis. « Non, ça va. Mais pourquoi vous êtes revenu ? » Ses sourcils s'étaient froncé, il savait bien qu'Az était comme ça, à s'inquiéter. Mais, il voulait juste qu'elle s'en aille, loin d'ici. Le plus loin possible, marmonnant des jurons dans sa barbe, il avait fini par se retourner, le regard fixant le groupe d'individus qui faisait fuir toute la population. Il se sentait impuissant, un sentiment des plus frustrants, la seule chose qu'il pouvait faire, s'était de forcer le duo à partir. Dieu seul sait que son monde s'écroulerait si l'un des deux finissait par se faire blesser. « Partez. Je vous rejoindrais après. Je te la confie Thaddy, s'il lui arrive quoi que ce soit, c'est après toi que j'irais. Az, empêche le de faire quoi que ce soit d'irresponsable. » Terminant sa phrase en français, de manière à ce que seule la rouquine puisse comprendre chaque mot qui la compose. Thaddy, les anciennes habitudes avaient la peau dure, il ne l'avait pas surnommé ainsi depuis qu'il l'avait quitté. Les poussant alors dans la direction opposée, comme pour les inciter à partir. Un dernier baiser déposé sur le front de la Harkwood, ne pouvant s'empêcher de penser au pire, les yeux humides « Partez maintenant ! ». Qu'elle soit d'accord ou non, n'était pas la question qu'il se posait, cela était identique pour le sorcier, il se moquait bien de son consentement. Seul, leur sécurité importait dans l'immédiat.

Il ignorait les raisons qui avait poussé Azilis à revenir auprès d'Aslan. Ou du moins, il les comprenait, sans pour autant les approuver. Le rouquine se faisait du soucis pour lui, pour eux tous. Mais revenir sur leurs pas étaient déjà bien trop dangereux. Elles se rapprochaient. Ces créatures, abominables, profanes - qu'il ne souhaitait jamais croiser dans les plus sombres de ces cauchemars. Le sorcier pouvait sentir leur présence, qui se rapprochait, beaucoup trop rapidement à son goût. On n'a pas le temps pour... sa voix était ferme, et pourtant non dénuée de terreur. Cette nuit, ils étaient tous les proies. Même eux, les supposés esclaves de leur folie lunaire. Ses compères et lui pouvaient se retrouver à la place de leurs sacrifices d'une minute à l'autre, et cette pensée lui glaça le sang. Oui, je sais, s'il lui arrive quoique ce soit, tu me tueras. Mais patiente encore un peu. Azilis est en sécurité avec moi. Il n'avait jamais autant été certain de ses propos qu'à cet instant. Le sorcier devait la protéger, quitte à se sacrifier en chemin, il s'en était fait la promesse, des années auparavant. Et il comptait bien honorer cette promesse. Il ignora Aslan, sachant toutefois à quel point il comptait pour la chasseuse. Il tira doucement sur la main de cette dernière, croisant son regard. Il est temps de partir.  Il ne la lâchait pas, que ce soit physiquement ou du regard, c'était un besoin vital qu'elle reste en vie. Ils se faufilèrent parmi la foule, bousculant certains, piétinant d'autres. Ils n'avaient pas le temps de se retourner, de s'excuser. Seule la survie comptait, au grand damne des autres. C'était ainsi, malheureusement. Et son instinct de sorcier -de chasseur, comme il avait été éduqué- le rendait d'autant plus déterminé. Son esprit pensa un instant à Nolan, à sa cousine, et même à Nerys et à sa soeur, qu'il avait aperçus plus tôt. Il aurait voulu s'arrêter et partir à leur recherche. Mais c'était impossible. Et avant même qu'ils aient pu franchir la sortie, un son strident les tétanisa, et une douleur violente le plaqua au sol. Du verre. Dans son dos, ses hanches, ses bras. Il voulait hurler, mais la stupeur l'en empêcha, l'adrénaline reprenant vite le dessus. Azilis ! On doit continuer, on doit atteindre... sa voix se perdit dans les hurlements de la foule, qui se voulaient plus incontrôlable que jamais. Et les créatures approchaient toujours. Il n'aurait pas hésité une seule seconde à porter la rouquine en position mariée, si elle ne s'était pas relevée, pourtant bien plus hagarde que lui. Le sorcier continua sa course- claudiquant en route, la douleur menaçant de le faire faillir à tout instant. Mais il n'avait pas le temps de s'occuper du verre. Pas pour l'instant, pas tant qu'ils n'étaient pas un minimum en sécurité. Prenant soin de vérifier qu'Azilis avait repris ses esprits - leurs origines leur donnant un avantage considérable dans la situation - ils finirent par déboucher sur un café. Thaddeus s'y était rendu, sans même réfléchir au départ. C'était leur endroit, là où ils s'étaient tant de fois retrouvés, auparavant. Mais ces jours là n'étaient plus, comme tant d'autre avant eux. Hé, ça va aller. Je te le jure. Ils avaient beau avoir fui la foule, le danger n'était pas écarté pour autant. D'une voix qu'il voulait tendre, il se rapprocha d'elle, la prenant dans ses bras, une manière de la rassurer elle, mais également pour se rassurer lui-même..

La panique la dévore et elle reste figée, ses doigts crispés sur la manche de l’inconnue. « Hey, il ne faut pas rester là, c'est dangereux, viens suis moi ! » qu’elle lui lâche comme si c’était aussi simple de se suivre dans une foule aussi dense en proie à la peur. Elle suit, pourtant, un peu, bon gré mal gré, bravant l’odeur de sang qui l’assaille et les hurlements qui lui déchirent les tympans, luttant contre l’envie de fuir dans une autre direction. Sa guide sait sûrement où aller… Ses phalanges s’agrippent toujours à la laisse du fidèle golden qu’elle traine plus qu’elle ne suit, l’autre main désespérément ancrée au bras de l’inconnue. « Que se passe-t… » finit-elle par interroger, à bout de souffle avant d’être interrompue pas les craquements du bitume. La louve se fige alors que l’odeur des sorciers lui écorche les sens. Ils sont là. Partout. Bons, mauvais, idiots… Nerys. Quelques secondes avant la catastrophe, Eilis songe bêtement à sa sœur parmi les enfants de la lune, minute suspendue durant laquelle elle s’inquiète, vraiment.
Puis le chaos reprend ses droits et ses ronces viennent fouetter l’air. Elle aperçoit brièvement les ombres épineuses danser devant ses yeux avant d’être prise de plein fouet. Le coup lui arrache un couinement misérable et elle se retrouve au sol, laissant son chien s’échapper, la canne blanche rouler au sol.
Le craquement familier des os brisés résonne encore entre ses deux oreilles. Elle les a entendus dix fois, cent fois se broyer pour mieux se reformer. Cette fois est différente. Elle n’était pas prête, la lune n’est pas encore pleine et la louve de gronde pas des entrailles, hurlant pour sortir entre les chaines épaisses qu’elle lui a octroyées. Cette fois, elle n’est qu’une humaine idiote avec trop d’alcool dans le sang et le processus de guérison instantanée inhérent à sa race n’a rien en commun avec celui des nuits gouvernées par l’astre sélène. Le hurlement qui s’échappe de ses lèvres de mue en cri de détresse, aussi animal que désincarné. Elle se traine, la louve, pitoyable silhouette au sol, cherchant à tâtons la bouée de secours qui lui manque. Ses doigts sensibles captent les vibrations au sol, les craquements de la terre, l’odeur acide de la magie et du sang.
« Stop, putain, stop ! Vous allez tous nous faire tuer… » Elle siffle à l’attention du sorcier dont elle ne capte que l’odeur désagréable, moins présente que celle des « monstres » qu’elle imagine attaquer la parade. Ils ne dégagent aucun effluve qu’elle ait pu connaître auparavant. Métallique, terrible. Mortelle.
Nouveau gémissement alors qu’elle se traine jusqu’à ce qu’elle pense être une boutique éventrée, un abri le temps que sa jambe se remette, qu’elle puisse fuir.
Partout les cris, l’odeur du sang et entre ses reins, la bête qui grogne et qui hurle à la vengeance.

La fête est terminée. Coupées dans son élan, par des cris strident qui viennent s'éclater contre ses tympans. Les sens en alerte, il pouvait déjà sentir cette odeur qu'il connaissait tant. Cette odeur liée au corps des êtres vivants, ce liquide qui permet de garder le corps en vie et uni. Instinctivement, il était venu étreindre Saoirse,prêt à s'en aller, à l'emmener loin pour revenir. Il était comme ça, trop d'humains en danger, trop d'humanité en danger. Un second cri et il sent les ongles de la louve s'enfonçant dans son bras, lui extirpant une légère grimace, les actions s'enchaînaient et avant même qu'il ne puisse lui répondre, elle s'était avalé par la foule en délire qui fuyait. Essayant de l'attraper en vain dans cette bousculade sans fin et d'une violence rare. Se frayant un chemin à travers l'amas de personne, tournant la tête dans tous les sens, l'odorat à l’affût d'une quelconque odeur de son accompagnatrice. Il aurait dû insister plus lourdement, faire le loup buté et l'obliger à rester chez Caleb. Les cris résonnaient dans sa tête, forcés de réduire son ouïe pour ne pas en devenir sourd, il pouvait à présent uniquement compter sur son odorat. Le contrôle de la situation lui échappe, comme pour beaucoup de personnes. Tout s'enchaîne, ne laissant guère le temps de s'adapter ou même de retrouver la blonde qui l'accompagnait. Les horreurs se suivaient sans laisser le moindre répit. Tout le monde est une cible, personne ne semble épargné. Certaines personnes perdent leur équilibre, se font piétiner sans remords, d'autres se heurte aux attaques violentes... Des blessures, le sang qui se répand sur le sol, une vision d'horreur. Lui rappelant cette nuit, qu'il désirait effacer, oublier.  Ses yeux finissent par retrouver la louve. Au milieu de ce carnage sans nom, sans précédent. Ils sont proches, mais ça n'a pas de réelle importance pour lui. Toutes ses victimes, toute cette rage et ce désir de tuer. Aucun mot, ne peut décrire ça. Si les guerres sont horribles, elles le sont au final pour une bonne cause, pour la défense d'un pays. Ce carnage, est tout simplement voulu, désiré par ces êtres abjects qui éprouvent un plaisir malsain à semer la terreur. De ses bras il était venu entourer le corps de la louve, passant l'une de ses mains sur son visage marqué par le bitume. L'emmener loin de cet amas de personne, serait une possibilité, mais ne garantirait pas sa sécurité, qui plus est, ceux encore conscients s'agripperaient telle des sangsues pour se faire tirer loin des créatures. Un doux baiser déposé sur sa tempe, proche de son oreille. « Ne bouge pas. Reste immobile, joue la morte. » C'est tout ce qu'il pouvait faire, tout ce qu'il pouvait lui dire. À quoi bon essayer de l'emmener ailleurs, ces êtres sont bien trop près, il ne ferait que précipiter la chute de Saoirse. La libérant de son étreinte, il finit par s'éloigner. Reniflant, comme s'il pleurait, comme s'il faisait son deuil. Attiré l'attention de ces faucheurs, de ces symboles de la mort, c'est tout ce qu'il pouvait faire. Il n'est pas fou, il est conscient de la différence de force qu'il existe, ainsi que de leur supériorité en nombre face à lui. La grande majorité de ceux qui s'était retrouvé proche d'eux, avaient fini par valser, seul ce sorcier, un peu fou cela dit, tentait encore de les repousser. Avant même de le réaliser, il s'était retrouvé devant l'un de ces êtres, aux yeux noirs. Rien ne semblait dégager de cette créature, si ce n'est son envie de meurtre. Effrayé et à la fois soulagé. Qui ne se sentirait pas effrayé devant une telle abomination. Le corps refusant de bouger, quand bien même il pourrait bouger, qu'est-ce qu'il pourrait faire ? Il n'est pas assez fou pour avoir l'espoir de s'échapper.

Formulaire:

Elle décide d’ignorer la question d’Aslan, la réponse lui semblant trop logique pour ressentir le besoin de la formuler à voix haute. On est revenus pour toi. Enfin, c’était le cas d’Azilis, en tous cas. Peu importait ce qui liait les deux jeunes hommes, Thaddeus s’était retrouvé ici simplement parce que la chasseuse l’y avait traîné. Elle fronce les sourcils, la confusion la gagnant l’espace de quelques secondes, à l’entente d’un surnom que même elle ne lui avait jamais donné. Il y avait des choses qu’elle ne savait pas. Et, pendant un instant, elle ne le supporte pas. Mais très vite ce léger désagrément la quitte, elle qui baignait désormais dans la panique et l’inquiétude. Elle hoche la tête à ses derniers mots, prononcés dans cette langue qu’elle avait apprise malgré elle, la langue du code, la même que celle qu’elle utilise pour lui répondre. « Tu peux compter sur moi. » Et puis, c’est la voix de Thaddeus qui la force à faire changer son regard de direction. Leurs iris se soudent, fatalement, et elle mord sa lèvre inférieure alors que sa dernière phrase résonne à l’intérieur de son crâne. Azilis est en sécurité avec moi. Peut-être que ce n’était pas totalement vrai, mais elle y croyait dur comme fer. Rien que de sentir sa main dans la sienne lui suffisait pour se sentir protégée de ces pâles créatures – et du monde entier. Le chasseur les pousse, tous les deux, et le sorcier tire sur sa main. Ils veulent qu’elle s’éloigne, ils veulent qu’elle parte. « Non… » Elle se débat légèrement, sentant à peine le baiser qu’il dépose sur son front, luttant contre leurs gestes, refusant de le laisser derrière elle. Si elle partait, c’était avec lui. Il répète son ordre, et quand elle recroise les yeux de son ancien amant, c’est le même message qu’elle y lit. Et alors qu’il l’entraîne avec lui, elle continue de se débattre, avec plus d’ardeur, criant le nom d’Aslan, un peu plus fort à mesure qu’elle s’éloignait de lui. Avant que l’adrénaline ne se fasse plus puissante. Bientôt, elle sent ses jambes s’animer d’elles-mêmes. Elle court sans réfléchir, ne s’occupe pas de ceux qu’elle heurte. Elle ne pense qu’à sa survie ; à celle d’Aslan qu’elle a l’impression d’avoir laissé pour mort ; à celle de Cilian, de Cora, d’Astrée. Et celle de Thaddeus, évidemment. C’est au moment exact où elle croit bon de bifurquer – de changer de rues et de prendre un raccourci pour retourner vers la périphérie de la ville – que ce son clair atteint ses oreilles et qu’une douleur naît dans son bras gauche. En baissant les yeux pour vérifier ce dont il s’agissait, elle ne porte plus aucune attention sur ses foulées ; et elle trébuche, roule sur quelques mètres, pour finalement s’immobiliser. Elle porte machinalement une main sur son ventre, et étouffe un sanglot. Elle a presque envie de rester allongée à même le bitume, d’attendre que Dieu lui fasse subir ce qu’il voulait. Mais la voix du sorcier la sort de son absence. Ses yeux s’ouvrent à nouveau, s’emplissent de larmes quand elle remarque que lui non plus n’avait pas été épargné. Elle n’attend pas plus longtemps pour se relever, le rejoindre, attraper sa main une nouvelle fois avant de se remettre à courir. Elle ne se préoccupe pas d’où ils vont, se contente de le suivre sans se poser la moindre question. Ce n’est qu’une fois assise sur le sol d’un endroit désert qu’elle s’autorise à prendre conscience d’où elle se trouvait. Les lumières étaient encore allumées, quelques boissons reposaient encore sur les tables. Mobilier qu’elle reconnaît – et elle ferme les yeux une nouvelle fois, essayant de ne pas penser à tout ce qu’elle avait (ce qu’ils avaient) vécu ici. Ca va aller. Affirmation qui force un rire sec à s’échapper d’entre les dents d’Azilis. Non. Tout était loin d’aller bien. Et lorsque ces simples pensées se heurtent à l’étreinte qu’il lui offre, elle baisse les bras. Les larmes coulent sans bruit, se contentant de mouiller l’épaule du brun. Elle remonte un peu sa main, tentative de caresse, qui échoue quand elle se coupe l’index sur l’un des bouts de verre qui s’étaient nichés dans son dos. Elle lâche un juron, glisse sur le sol pour se retrouver derrière lui. « Bouge pas. » Elle avait voulu se faire claire et dure, mais les sanglots qui se pressaient dans sa gorge l’en empêchait. Faible, encore. C’était toujours devant lui qu’elle l’était. Et elle commence à les retirer, un par un, se mordant la lèvre à chaque fois qu’elle lui faisait mal.

T'étais là pour le boulot et t'étais presque de bonne humeur aujourd'hui, si on oublie un fait majeur : c'est la St Patrick et tu ne peux pas boire de bière. C'est pas de la merde ça franchement ? Enfin, tu peux tout de même en quelques sortes participer aux festivités, ça fait du bien des sorties comme ça de temps en temps. Ton partenaire et toi êtes appuyés contre des barrières et observez la foule tranquillement. Vous n'interviendrez que s'il y a une altercation, le reste de votre travail aujourd'hui est un peu comme aller au cinéma, sauf que l'écran est la rue. C'est distrayant, même assez amusant vu que tout le monde ou presque est au moins pompette. Une belle soirée en perspective même si le travail durcira lorsque l'état d'ébriété de la foule et principalement des hommes évoluera. Il ne fait pas trop froid, tu ne sens pas la brise fraîche qui fait frissonner ton collègue puisqu'elle ne t'affecte pas. Comme tout le monde tu t'attends à des festivités similaires aux années précédentes, se déroulant dans la bonne humeur avec uniquement quelques incidents de cons bourrés et de petits merdeux qui profitent de la foule et de l'agitation pour emmerder le monde. Sauf que les merdeux tu ne les attendais pas comme ça. Tu t'attendais principalement à des jeunes. Pas à des nécromanciens. Pourtant vous auriez dû savoir que ce n'était qu'une question de temps avant leur prochaine attaque. Tout le monde le sait dans la vie surnaturelle de Glencullen, ils sont arrivés et ils ne faisaient sans doute pas que passer au vu de la population magique importante. Personne n'étais prêt pour ça, et au premier cri qui a retenti vous avez tous bondi. Ce n'était pas un cri festif, c'était un cri de terreur, un cri de douleur. Ils sont partout maintenant, c'est ce qu'il semble. Ils se sont attaqués à l'arrière de la foule, comme une horde de prédateurs face au troupeau d'herbivores. Certains se sont dirigés vers eux, tu as choisi d'aider les gens à fuir. Tu as très bien compris que peu de gens ont une chance face à la menace, mieux vaut courir que mourir. Tu pousses les gens en faisant attention de ne pas les bousculer, tu rassembles quelques enfants et les refiles soit à leur mère qui les a retrouvés soit à quelques adultes plus calmes qui essaient aussi d'aider, les instruisant de se regrouper tous avec les enfants dans un endroit défini. Ce sera plus facile pour retrouver les mômes après et les réunir avec leur famille. Tu cours partout, sentant monter l'angoisse en toi. Ils ne peuvent que se rapprocher, ils vont arriver. Il y a quelques personnes par terre qui ont été malmenées par la foule. Malheureusement tu repères un mort. Tu aides d'autres à se relever et les imposes à des gens bien portants pour les soutenir. Ne pas paniquer, ne pas paniquer. Tu as autant envie de fuir que d'essayer d'attaquer ces monstres. Tu repères une silhouette au sol au milieu de la débâcle, se faisant piétiner. Elle bouge encore et tu essaies de te frayer un chemin au milieu des animaux terrifiés. Tu te fais bousculer, tu prends quelques coup mais tu la vois. Tu la vois et soudainement tu la reconnais. Killingworth. La stagiaire énervante qui te prodigue pourtant beaucoup de plaisir. Cette fois c'est personnel, tu te sens investi d'un devoir supérieur. Tu appliques deux fois plus de force dans ta tentative de la rejoindre et finis par exploser. Une dizaine de personnes sont écartées par un souffle d'air violent qui les couche. Bien sûr cela les met en danger et tout ça pour une personne, ça devrait être contres les principes d'un policier, sauf que tu t'en fous. Il t'arrive de faire ton boulot correctement, comme il y a cinq minutes, mais la morale tu la balances par la fenêtre dès que ça t'arrange. Oui, ces gens que tu as poussés sont en danger mais ils n'avaient qu'à te laisser passer et éviter de piétiner la stagiaire. Tu t'accroupis à côté du corps de la brune qui est de toute évidence toujours consciente. « Come on Clarissa get up, we gotta go right now. » Etat de choc, elle te semble hors de ton corps, complètement hébétée. Tu la gifles pour essayer de la sortir de sa transe. « Killingworth! Get up! Right now! » Ta voix est tranchante, ton ton impérieux. Elle te semble réagir un peu, tu jettes un regard derrière ton épaule. Les nécromanciens sont beaucoup trop près à ton goût. Alors tant pis pour les efforts de la brune, tu la saisis par le haut du corps pour l'épauler. Elle ne marche pas assez vite putain. En même temps tu peux pas lui en vouloir, elle a été piétinée par un troupeau de buffles en débandade, c'est un miracle qu'elle ne nous ait pas encore fait une Mufasa. Rien à foutre, tu te penches pour glisser un bras derrière ses genoux et la soulèves entièrement. Oh putain elle est lourde. Faut dire que t'es pas non plus l'homme le plus musclé du coin mais merde, tu te démerdes quand même à la base. Tu te mets à courir, entravé par le corps, essayant de quitter cet endroit, tout comme les civils restants. Faites qu'ils vous laissent tranquille ces sorciers maudits.

Spoiler:

Simple mouvement de tête en guise de réponse au sorcier. Les mots n'étaient d'aucune utilité dans cette situation, il n'y avait rien d'autre à ajouter, il s'était contenté de pousser la chasseuse alors que de son côté Thaddeus la tirait. Il ne l'admettrait jamais ouvertement, mais le Killingworth, n'avait pas tort, elle était bien plus en sécurité avec lui. Même si l'entraînement qu'avait subi le chasseur lui donnait un avantage sur certaine personne, son taux d'alcoolémie le faisait bien rapidement baisser, c'était déjà un miracle qu'il tienne encore debout et qu'il puisse aligner les mots dans un ordre correct. Un pincement au cœur, lorsque ses lèvres étaient venu se déposer rapidement sur le front de la chasseuse avant qu'elle s'éloignait à chaque instant. Beaucoup de victime sont déjà été faite, mais celle des deux fuyards lui importaient bien plus qu'une quelconque autre survie. Secouant la tête pour chasser ses pensées sombres, la chance ne semblait pas de son côté. Ou alors son temps de réaction avait fortement diminué à cause de la bière, quel qu'en soit la raison, il venait de se faire faucher par une branche d'un roncier. Le souffle coupé par le choc, d'une rare violence. Une intensité, qu'il avait rarement connue, l'envoyant littéralement s'écraser contre une façade. Un bruit sourd résonne à ses oreilles. Un son qu'il a bien trop l'habitude d'entendre pour ne pas le reconnaître. Les os qui se brisent. Un bruit qu'il aurait préféré ne pas entendre provenir de son corps. Écho, suivi d'une douleur sans précédent. Dieu sait, combien de blessure il a subie avant ça, mais aucune de semblable. Nul besoin de radio, ou de faire partie du corps médical pour savoir, que plusieurs de ses côtes se sont brisé sous le choc. Le dos endolori par le contact contre la façade, il pouvait déjà se voir allongé pendant plusieurs jours dans ces mêmes lits qu'il a l'habitude de voir. Une main posée au niveau de sa blessure, il n'avait que peu de choix. Mais quoi qu'il fasse, les chances pour que les os brisés causent d'autres dommage interne restaient élevé. Rester assit, au sol, était cependant synonyme de mort certaine. . « Au moins j'aurais connu la sensation de voler dans les airs. » Humour déplacé dans une telle situation, mais chacun l'affronte à sa façon. L'humour a toujours été son moyen de défense, les blagues douteuses et la violence. Les pensées tournés vers les fuyards, il ne pouvait qu'espérer qu'ils s'en sortent indemnes. Une pensée généralisée, il n'était plus question de la survie d'une seule personne, même s'il priait inconsciemment pour la chasseuse et le sorcier. Stop, putain, stop ! Vous allez tous nous faire tuer... Une voix féminine qui résonnait dans son oreille, juste à côté de ses bourdonnements causés par le choc. Le regard se relevant vers la scène. À quel point faut-il être assez fou pour pouvoir croire s'en prendre à l'une de ces créatures, surtout quand sa précédente attaque a déjà été retourner contre soi. Après tout, si ce sorcier de la terre, n'avait pas essayé de jouer les héros, aucun d'eux ne serait dans cet état. La femme se traînant pour s'échapper et lui, cloué au sol avec les côtes brisées.
La main gauche parcourant le sol pour ramasser le premier objet tombant sous son emprise. Quitte à ce que ça fasse mal, si c'était le moyen pour faire redescendre ce sorcier sur terre, alors tant pis. Mais le laisser continuer revenait à le laisser faire un suicide collectif. Envoyant finalement tant bien que mal la pierre en direction du sorcier, pour lui faire prendre conscience de sa folie. S'aidant de ses mains pour se relever non sans douleur et sans risque, il en était conscient, mais il avait plus de chances de survivre en partant plutôt qu'en restant assît à attendre la mort. . « Redescends de ton arbre Tarzan ! Si tu veux crever c'est ton souci, mais ne nous entraîne pas dans ta folie. Faut qu'il te perfore le rectum pour que tu comprennes que ça sert à rien !? » Toujours aussi glamour même dans la situation actuelle. Partagé entre la colère contre cet être de la Lune et la haine envers ces créatures sans précédent. Au même titre que la femme qui rampait pour s'échapper, le brun s'aidait de sa main gauche et des murs pour s'éloigner. Pénétrant dans la première boutique qui était apparu, se faufilant dans les allées pour atteindre la pièce la plus au fond, la plus lointaine. Se laissant tomber contre le mur, le corps hurlant à la douleur, alors qu'il se mordait les lèvres pour contenir les sons qui pourraient en sortir. Impuissant. Un sentiment qu'il détestait par-dessus tout, se sentir impuissant, inutile. Un côté protecteur bien trop présent est une fierté qui vient tout juste de se faire piétiner par ces créatures. Restant assis dans son coin, caché comme un enfant derrière les jupes de sa mère, l'alcool aidant à diminuer cette douleur déjà bien intense, il ne pouvait qu'imaginer ce qu'il aurait ressenti en étant à jeun. La tête tapotant contre le mur, attendre, c'est tout ce qu'il pouvait faire, attendre et espérer.

Nolan avance, bien décidé à ne laisser personne se mettre sur son chemin. Le sorcier a toujours été doué pour gérer les situations de crise, pour prendre des décisions rapides sous la pression, bien qu'il n'ait jamais été confronté à un événement de cette ampleur. Oublié toute humanité, il n'a qu'une chose en tête, partir d'ici. La pression de sa main sur celle de Cora se fait un peu plus forte, tandis qu'il accélère le pas, poussant les quelques personnes effrayées qui sont autour d'eux. La voix de la brune s'élève par-dessus le vacarme ambiant. Il voudrait bien lui expliquer, mais ça serait perdre du temps inutilement. Ils auront tout le loisir d'en discuter une fois qu'ils seront loin d'ici, loin d'eux. Ils y sont presque, la foule commence à se faire moins oppressante alors qu'ils approchent de leur échappatoire, de leur porte de sortie. La panique a dispersé les habitants de Glencullen dans tous les coins, et peu ont eu assez de bon sens ou de chance pour prendre la bonne décision. Nolan y croit à leur possibilité de s'enfuir. Il jette un coup d’œil à Cora à ses côtés, avant d'être brusquement arrêté dans sa course. Son corps et son visage se heurtent à ce qui semble être un mur. Le choc est violent, le ramène quelques pas en arrière, sonné. Ça aurait presque pu être risible, dans d'autres circonstances. Il écarte la douleur de ses pensées, essuie le sang qui coule de son nez d'un simple revers de la manche. Ses iris s'attardent devant lui, essayant de comprendre ce qui a bien pu l'arrêter. Sa paume vient se poser contre un obstacle invisible, comme une paroi qu'il ne saurait voir. « Putain, les fils de pute. » Au fond, il aurait dû s'en douter. Bien sûr qu'ils ne laisseraient pas les choses au hasard, qu'ils n'offriraient à personne la chance de s'enfuir avant qu'ils ne l'aient décidé. Nolan sent la rage monter en lui, son poing vient taper contre le mur invisible, comme si cela pouvait servir à quelque chose. Il se tourne vers la chasseuse, son regard se posant sur son visage. « Ça va? » Car elle aussi a percuté l'obstacle de plein fouet. Les cris continuent de s'élever parmi la foule, tandis que Nolan observe autour d'eux, sur la défensive. « On ne peut pas partir, il faut qu'on se cache. » Mais où? Aucun endroit n'est sûr ici, l'accès aux bâtiments est peine perdue. Les portes sont closes, les rideaux tirés. Tous ceux qui ont eu l'occasion de s'y réfugier s'y sont cloîtrés, laissant la grande majorité des habitants dans les rues, face au danger. Nolan pousse un soupir, avant de faire volte-face. Ses iris scannent la grande rue, s'arrêtent sur bâtiment, sur une petite fenêtre donnant probablement sur une cave, à plusieurs mètres d'eux. Une fenêtre qu'ils pourraient facilement casser. Son regard rencontre celui de Cora, qui semble avoir compris son plan. Un simple hochement de tête suffit avant qu'ils ne reprennent leur fuite.

C'était un endroit qu'il n'aurait jamais pensé revoir, ni même fréquenter de nouveau un jour. Qui plus, en sa compagnie à elle. Leurs adieux s'étaient voulus tellement déchirants, qu'il n'avait jamais plus eu le courage d'y retourner, si ce n'est pour éviter d'être à nouveau envahi par la mélancolie et le regret. Thaddeus pouvait pour une fois affirmer qu'il avait peur, bien plus encore que ce jour décisif où il avait tiré un trait sur sa famille. Quelque chose de rare, en soit, la peur. Celle qui vous tiraille les entrailles et menace de vous faire chavirer ; qui vous fait battre le coeur si vite, que vous en venez à vous demander si un organe est capable d'une telle prouesse. Le sorcier avait peur, oui, mais pas seulement pour lui. Azilis.  Elle était sous sa protection, désormais, et jamais - ô grand jamais -  il ne laisserait quelque lui arriver.  Quelques lames de la rousse viennent se déposer sur ses épaules, avant que ses mains viennent caresser son dos, dans une tentative vaine de le rassurer, alors qu'il voulait simplement la protéger du monde extérieur, et des dangers qui rôdaient là-dehors. De ses semblables, qui n'avaient pourtant plus rien d'humain, si ce n'est leur apparence cadavérique. Dépourvus d'âmes, dépourvus de remords. Il aurait aimé que les choses soient plus simples. Qu'ils n'attaquent pas entres autres, et qu'Azilis et lui puissent se contenter d'un moment de paix loin de tout cela, du surnaturel et de leur vie trop compliquée. Mais les mains de celle-ci vinrent se heurter au verre, et la réalité le rattrapa de nouveau telle une gifle en plein visage. Elle  l'intime de rester immobile, de se laisser faire. Alors, il obéit,  frissonnant à chaque fois qu'elle retire un bout de verre. Le sorcier ignorait si cela était dû au verre incrusté dans sa chair, ou bien au frôlement de ses doigts contre sa peau. Sans doute une combinaison des deux. Ils ne vont pas tarder à revenir. Avec un peu de chance, ils ne nous trouveront pas ici. Sa voix était faible, semblable à un soupir, de manière à ce que seule Azilis puisse l'entendre. Le sorcier haïssait le fait que sa magie soit impuissante face à celle de ces choses, et qu'elle leur soit inutile si jamais ils venaient à devoir s'enfuir. Toutefois, il envoya une prière silencieuse à la Déesse, dans l'espoir qu'elle l'entende. Mais au fond, ces choses aussi, étaient ses enfants. A  cet instant, la peur de mourir était si grande, qu'il dut ravaler sa fierté, pour se concentrer de nouveau sur la rousse, qui semblait bien plus terrifiée que lui. Au fond, il s'en moquait de qui était le plus terrifié des deux. Tant qu'elle était saine et sauve, elle pouvait bien déverser toute sa peur, sa colère ou même son anxiété sur lui - cela serait au moins une preuve qu'elle allait bien, et qu'elle continuerait de l'être. Et c'est en la regardant de plus près, qu'il remarqua un fait étrange. Trop étrange à son goût. Pourquoi tu touches ton ventre comme ça ? Tu es blessée ? Fais-moi voir. Si elle s'était retrouvée avec un bout de verre dans l'abdomen, et  faisait une hémorragie interne par sa faute, Thaddeus ne se le pardonnerait jamais.

Elle hoche la tête à la remarque du sorcier, lentement, les yeux toujours rivés sur son dos - duquel elle retirait encore quelques bouts de verre. Ses larmes avaient séché sur ses joues. Elle ne se rendait compte que maintenant de la peur qui lui serrait les tripes et l'estomac. Rares avaient été les moments où elle avait été si effrayée - mais ce soir, comme celui où Thaddeus avait failli faire d'elle son sacrifice, elle a peur de mourir. Peur de ne jamais sortir de cet endroit car peur d'y perdre la vie. Elle fait tomber un dernier bout de verre à côté d'eux, lâche un léger voilà, qui sonne plus comme un soupir qu'un réel mot. Elle  ne peut s'empêcher de glisser sur le sol pour lui faire face à nouveau, parce qu'inexplicablement, voir son visage et ses yeux la rassurait. Et elle pince les lèvres à sa question, réalise que poser sa paume sur son ventre était déjà devenu un automatisme. Tu es blessée ? Ça lui arrache un sourire, malgré elle. « Pas cette fois. » Elle souffle un grand coup. Parce qu'elle ne veut pas lui dire. Pas ici, pas maintenant - pas avant le plus longtemps possible. Mais une partie d'elle se dit qu'après tout, ils allaient mourir ici, maintenant. Qu'avait-elle à perdre ? Plus rien. Alors elle prononce les mots. Sujet, verbe, adjectif. Phrase simple mais qui ferait l'effet d'une bombe - effet immédiatement visible sur le visage de Thaddeus. Le silence retombe, se pose pour ce qui lui semble des heures. Jusqu'à ce que de sourds bruits se fassent entendre, suivi de celui, familier, de l'eau qui coule vite et fort. Elle ne réfléchit plus, entreprend de se lever, tire sur le bras de l'autre ; à la fois pour le faire se lever à son tour, et pour le tirer de l'espèce de transe dans laquelle la bombe d'Azilis l'avait plongé. Le niveau monte plus vite que la chasseuse aurait pu le concevoir. Elle ne sait pas trop comment, parce que ses réflex l'empêchent toujours de réellement penser à ses mouvements, mais ils se retrouvent dehors, trempés, la peau par endroit déchirée par Dieu savait quoi. A la réflexion, il devait probablement s'agir de la vaisselle que le torrent avait dû briser au passage. Elle plisse les sourcils, la respiration haletante. Ils avaient essayé de marcher contre le courant, et elle sentait encore la violence avec laquelle il les avait repoussé. Elle n'arrivait pas à retrouver un rythme respiratoire stable, avait enroulé ses bras autour du ventre, plus visible qu'un peu plus tôt, sa robe verte collant à sa peau. Elle soupire, lève les yeux pour s'assurer que le sorcier va bien, pince les lèvres en pensant au sang qu'il avait perdu. Mais elle remarque que le silence avait regagné les rues du centre ville. Ils étaient partis. « Dieu merci. » Pensée qu'elle avait inconsciemment formulée à voix haute. Et c'est tout aussi inconsciemment qu'elle laisse ses doigts trouver ceux de Thaddeus, et les entrelace, soulagée d'être encore en vie.

Le dos plaqué contre le mur glacé de l'étroite pièce où il avait trouvé refuge. Mais de quoi se protégeait-il réellement ? Outre fuir lâchement ces attaquants qui arpentaient les rues. Il se cachait de lui-même. De sa faiblesse, mais surtout de la mort. Pour une fois, il était effrayé, apeuré à l'idée que sa vie pouvait prendre fin d'un claquement de doigt. Alors qu'il pensait être seul, dans ce moment de faiblesse, une main recouvrant ses yeux humides, desquels s'échappaient quelques perles salées. Un signe de faiblesse, qu'il ne supportait pas, mais qui au fond le soulageait. Un silence qui fut rapidement brisé par une voix, une voix féminine, le forçant à garder son visage entre ses mains, alors que les mots prononcés par cette demoiselle agissent comme une épée de Damoclès, suspendue au-dessus de sa tête. À l'heure actuelle, rien ne pourrait être pire à ses yeux. Lui qui s'efforçait de garder une attitude sereine, dure, aux yeux des autres, il était là, souffrant de ses côtés brisés, qui lui arrachait quelques cris bas, priant pour sa propre survie. Aucun mot ne sortait de ses lèvres, lui qui est pourtant toujours porté sur l'ironie, sur l'irrespect, soyons réaliste. Il avait laissé le silence s'installer. Recevoir de la pitié des autres, serait le coup de grâce. Et c'est bien le genre de sentiment qu'il ne veut pas ressentir en croisant le regard d'une quelconque personne. Un silence apaisant, dans lequel il reprenait doucement son souffle saccadé par ses peurs. Un bruit sourd et prolongé. Un fond sonore qu'il ne connaissait que trop bien était venu briser ce calme utopique qu'il avait créé. Le bruit des flammes qui ravagent, brûle, carbonisent. Ce bruit qu'il avait écouté pendant plusieurs minutes il y a plusieurs années, incendie qu'il avait lui-même déclenché à cette époque-là, il n'en connaissait que trop bien les bruitages, l'odeur et ce sentiment de chaleur intense.
N'importe qui aurait commencé à s'enfuir, à courir en entendant ce bruit, en sentant cette odeur de brûler. Mais, il restait là, assit, comme s'il attendait que les flammes viennent le consumer. Hésitant, la vie ou la mort, le choix était en quelque sorte sien. Être enfin libre de soi-même, être en paix, il faut l'avouer, il en rêvait. De partir. Loin. De rejoindre l'immortel rêve de la mort. Pourtant dans un élan d'espoir de survie, prenant appui sur ses mains pour se relever, il s'était mis à marcher, sans prononcer un mot. La fumée des flammes commençait à remplir la boutique, agissant alors comme un véritable brouillard, camouflant la vision du chasseur. Chaque mouvement de son corps entraînait une douleur intense, l'effet de l'alcool diminuant au fur et à mesure. Les pieds s’emmêlant dans un fils qui traînait, provoquant une chute des plus spectaculaires. Comme si les côtes ne suffisaient pas, cette chute aurait pu être fatidique pour le jeune homme. Pourquoi avoir décidé de se lever ? Décider se survit . Jamais il n'en donnera la réponse, à qui que ce soit. Encore un secret qu'il allait garder pour lui. Une cascade violente, laissant son bras droit entré en collision avec un meuble, une étagère, impossible de le dire. Un choc des plus violents, si on écarte son vol plané. Un bruit sourd, une douleur intense se propageant dans son corps. Une sensation d'écrasement, d'éclatement. Si l'os de son bras, c'était finalement brisé à son tour, sa chute avait eu d'autres répercussion à l'intérieur de son organisme, alors que la fumée des flammes commençait à lui faire perdre conscience. Se traînant alors, comme un simple ver à l'extérieur de la boutique, avec le peu de force qui lui restait, cherchant l'air pur et frais de l'extérieur. Alors que son corps criait à la douleur et que ses globules rouges coulaient de ses lèvres. Sorti finalement de la prison de fumée, étalé au centre du passage, comme l'un des nombreux corps sans vie, les yeux clos, bien que chasseur, il n'en restait pas moins humains, ayant respiré bien trop de fumée pour rester conscient, l'un de ses poumons et sa rate perforés, mais c'était toujours mieux que de se laisser mourir par les flammes.