l'attaque des nécromanciens ne remonte qu'à quelques jours, et pourtant ta vie a repris son cours bien plus rapidement que tu ne l'aurais cru. jusqu'à la prochaine. il y aura une prochaine, t'en es persuadée. maintenant qu'ils sont en ville, ils ne comptent pas partir de si tôt. mais étrangement, ça ne t'inquiète plus autant. il faudra juste s’accommoder, être plus vigilant (pour les autres, peut-être. tu ne le seras pas. tu ne l'as jamais été, toi que rien n'atteint). la menace était déjà présente. elle l'a toujours été. à chaque coin de rue. un chasseur. un loup. alors une espèce de plus ou de moins, ça ne changera pas grand chose. ça ne changera rien, même. tu le sais, peu importe tout le raffut qu'ils font sur leur passage. peu importe ce qui se dit. tu n'as pas besoin d'eux pour que ta vie soit un vrai chaos, de toute manière. tu n'as besoin de personne. ta simple petite personne suffit amplement. à vrai dire, ce ne sont pas tant les nécromanciens qui t'ont marqué, lors de cette soirée. non. c'est une toute autre chose. bien plus personnel, bien plus égoïste. car au milieu de tout ce vacarme, tu n'as pu t'empêcher de remarquer nolan. avec une humaine. encore. et tu ne peux que te demander; si ce détail n'avait pas accaparé ton attention, aurais-tu retrouvé clarissa plus tôt? probablement. certainement, même. mais peut-être que les choses devaient se passer ainsi. pour t'ouvrir les yeux, d'une part. et t'empêcher de littéralement disjoncter, d'autre part. si tu avais vu, de tes propres yeux, ton amie (?) – tu tiens à clarissa, d'une certaine manière. ça a fait tilt, comme ça le fait toujours. sans explication. sans raison. ce qu'on ressent n'en a pas besoin, de toute manière – se faire piétiner, tu aurais tué toi-même ces personnes. tu aurais participé au massacre. sans hésitation. sans culpabilité. tu le sais, parce que toute cette agitation, toute cette cohue autour de vous avant que vous vous retrouviez séparées était déjà entrain de te monter à la tête. tu voulais que ça s'arrête, que tout le monde se taise. alors finalement, peut-être que te retrouver dans un endroit un peu plus isolé, avec quelque chose pour t'occuper l'esprit n'était pas une si mauvaise chose, dans un sens. même si ton épaule en a quelque peu souffert. une vilaine luxation. d'où le fait que ton bras gauche n'est pas dans la manche de ta veste (et qu'il se trouve dans une écharpe, accessoirement). et soudainement, cette simple pensée te ramène enfin à la réalité. tu étais, l'espace d'un instant, loin d'ici. t'en as oublié où tu te trouvais. en prison. encore. pour une idiotie. toujours. c'est drôle, dans un sens. tu passes souvent derrière les barreaux, mais jamais pour les crimes que tu commets. oui, tu trouves ça amusant. et un sourire s'affiche sur tes lèvres alors que tu t'enfonces un peu plus sur ce qui sert de banc, t'adossant contre le mur. j’y étais presque, tu as vu? tu tournes la tête, positionnant ton regard sur elric. tes lèvres s'écartent un peu plus face à son expression. la prochaine fois, ce sera la bonne. tu laisses échapper un rire, plus moqueur que tu ne l'aurais souhaité. t'en restes pas moins fière, tout de même. pour plusieurs raisons. non seulement tu pensais qu'il s’apitoierait sur son sort à la simple idée de se retrouver en prison – ce qui n'est visiblement pas le cas. ou pas encore. la nuit risque d'être longue – mais en plus, il parle déjà de recommencer cet exploit puéril. ça t'intrigue, mine de rien. il aurait tous les droits d'être en colère contre toi pour l'avoir embarqué dans une telle situation. mais l'alcool stagne encore dans vos veines. vos – ses. tu contrôles (c'est ce que tu crois) – idées sont encore embrumées. elric, commences-tu. ta voix se fait douce, comme pour contre-balancer ce que tu t'apprêtes à lui dire. enfin, ce que tu t'apprêtes à lui faire comprendre, plutôt. lui dire directement serait bien moins marrant. même s'il ne mettra que quelques secondes à réaliser. est-ce que tu sais quel jour on est?

la tête contre le mur se trouvant derrière toi, tu fixes elric. avec un sourire, dans un premier temps. un petit sourire fier, qui affiche un air serein sur ton visage. tu restes calme, alors qu'il sombre de plus en plus dans la panique. deux comportements contradictoires, pour deux personnes bien différentes. et pourtant si semblables à la fois. vous avez plusieurs points communs – t'es persuadée que tu peux en trouver bien plus tu ne le penses – mais vos caractères vous séparent indéniablement. ton sourire s'efface, arborant un air plus sérieux. tu te contentes de le regarder sans un mot, le laissant extérioriser. quelques minutes. quelques minutes pendant lesquelles tu le laisses perdre le contrôle de lui-même. il en a surement besoin. toi non. et tu n'as surement pas besoin d'assister à une telle scène. bien qu'au fond, égoïstement, tu te sentes tellement forte face à ça. face à lui. tu ne devrais pas. tu n'es pas mieux, tu le sais. tu as beau ne pas céder à la panique, tu as un autre vice; la tristesse. tout le temps, sans raison apparente. alors tu ne devrais pas. tu ne devrais pas te rassurer lorsque tu assistes à des scènes comme celles-ci. mais c'est plus fort que toi. parce qu'il s'agit d'elric. bien qu'il puisse constituer une bonne source de distraction – tu t'amusais, jusqu'ici – il n'en reste pas moins elric. une petite chose apeurée. une petite chose faible. tu l'as toujours vu ainsi, et visiblement, ce n'est pas aujourd'hui que les choses vont changer. c'est surement pour ça que tu ne l'as jamais vu avec plus de considération. il représente tout ce que tu t'es refusée d'être. tout ce contre quoi tu t'es toujours battue (et te bats encore. toujours. c'est une bataille permanente). nerys, on doit sortir d'ici. tu secoues doucement la tête tout en levant les yeux au ciel. plus par exaspération que par protestation. même si la réponse à ça reste non. si vous êtes ici, c'est pour une bonne raison. stupide, certes, mais tu ne peux t'empêcher de penser que rien n'arrive par hasard. jamais. t'as toujours été ce genre de personne. à penser que tout est écrit. certains pourraient penser qu'on peut altérer le cours des choses, notamment en fonction des décisions que l'on prend. mais pas toi. même si la vie offre des chemins différents, tu restes persuadée que le résultat est le même, au final. le hasard n'existe pas. si les choses doivent se passer ainsi, qu'elles se passent ainsi. nerys.. on va crever!? that's it. time's up. tu ne supporteras pas plus de ses stupides jérémiades. ou tu risques bien de perdre le contrôle à ton tour. mais pas de la même manière. t'as fini? parce que tu commences sérieusement à me taper sur les nerfs. tu lui laisses quelques secondes supplémentaires, observant sa réaction. on va pas mourir. ton calme, toujours. et puis, qu'est-ce que ça changerait? tu ne crains pas la mort. il ne devrait pas la craindre non plus. vous êtes des sorciers. la mort n'est pas une fatalité, pas une fin en soit. le temps venu, votre père vous accueillera les bras grand ouverts. une place de choix vous attend, bien au chaud. peu importe ce que vous faîtes de votre vivant. peu importe si vous êtes quelqu'un de bien, ou non – notion extrêmement subjective, de ton point de vu. l'enfer vous attend. un enfer bien plus prometteur que ce que l'on peut entendre. on va souffrir, par contre. un sourire se glisse à nouveau au coin de tes lèvres. t'en restes pas moins sérieuse. t'es déjà passée par là, tu sais ce que c'est. une souffrance inimaginable. pire que tout ce à quoi vous pouvez faire face. tu vas avoir l'impression de mourir. mais non. au final, vaudrait peut-être mieux.