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"in the darkness i will meet my creators
and they will all agree that
i’m a suffocator"
ft/ nolan breslin.

la nuit est particulièrement froide ce soir. la brise glacée te caresse, te fait frisonner. tu n'es pas vraiment vêtue convenablement pour la saison. une simple veste en jean couvre tes épaules. en dessous d'elle, une robe. évidemment, l'idée de mettre des collants ne t'est pas venue en tête une seule seconde. tu ne jugeais pas ça utile, étant donné que tu as passé la soirée à danser - et boire, un peu. tu commences à regretter. t'es déjà désespérée en pensant au nombre de pas qui te séparent de ton immeuble. un soupire t'échappe, alors que tu croises les bras, essayant de trouver un peu de chaleur. tu ne peux empêcher les tremblements de ton corps. ça t'apprendra, à ne toujours en faire qu'à ta tête. les rues sont quasi-désertes et seuls les lampadaires font office de source lumineuse. et pourtant, la seule chose qui t'inquiète est de savoir si tu vas réussir à rentrer chez toi avant d'avoir complètement gelé. tu rêves d'un bon chocolat chaud. avec des marshmallows, tant qu'à faire. ça te ferait presque saliver. au détour d'une rue, tu te rends finalement compte qu'une étrange sensation parcourt ton corps. tu ne t'en étais pas aperçue parce que tu étais focalisée sur la froideur ambiante, mais elle est bien présente. quelqu'un te suit. tu tournes légèrement la tête, pas entièrement. juste de quoi voir l'aura se dégageant de cette personne. un léger sourire s'affiche sur tes lèvres. il a des tas de personnes pouvant souhaiter s'en prendre à toi. tu ne peux le nier. ta condition ne t'aide pas, mais ta façon d'être y est également pour beaucoup. loups, ou même nécromanciens, maintenant qu'ils ont débarqué en ville. non pas que tu leur ais fait quelque chose de particulier, mais la légende raconte qu'ils tuent pour tuer. tu ne sais pas grand chose sur eux, mais tu n'as pas la prétention de te penser intouchable. non, ce n'est aucun des deux qui marche sur tes pas. son aura est celle que tu trouves la moins jolie. elle est fade, à peine visible. jaune, une couleur que tu n'apprécies pas particulièrement. tu changes de direction et accélères le pas. s'il faut se battre, autant se trouver dans un endroit approprié. tu ne mets pas longtemps avant d'arriver dans la forêt. au final, t'étais plus proche de ce lieu que de ton appartement. et c'est une bonne chose. plus vite ça sera réglé, plus vite tu pourras souffler. tu raccélères un peu, avant d'en profiter pour retirer tes chaussures à l'aide de tes pieds. des escarpins. tu ne comptes pas les laisser te gêner. tu finis par te retourner, te retrouvant en face d'un homme. pas très vieux. il ne te dit absolument rien. tu le détailles pendant quelques secondes avant de froncer les sourcils. disappointed? demande-t-il avec un sourire pervers. il te dégoûte déjà. pour l'être, ça tu l'es. aucune arme, rien. ce n'est pas un chasseur, comme tu le pensais. tu te trouves en face d'un humain. t'es un peu confuse, sur le coup. et en effet, extrêmement déçue. sans attendre de réaction de ta part, il se jette sur toi et te plaque contre un arbre. l'une de ses mains se trouve déjà sur ta gorge. seriously? tu ne peux pas y croire. tu te demandes si c'est une blague. une caméra cachée, peut-être. tu n'apprécies guère le regard qu'il te lance. un bout de viande, voilà que tu es à ses yeux. tu comprends ses intentions, ses pensées. mais paradoxalement, t'es plus offensée qu’apeurée. rapidement, il attrape le haut de ta robe avec l'intention de tirer dessus. hors de question. avant même de lui en laisser l'opportunité, tu murmures quelques mots en gaélique. ton potentiel agresseur se retrouve alors propulsé plusieurs mètres plus loin, avant de tomber à terre. avantagée par l'effet de surprise, tu t'approches de lui et t'accroupies à ses côtés. t'attrapes sa gorge, guidée par la revanche. oeil pour oeil, dent pour dent. do you really think i'm going to let a disgusting guy like you, touch me? son regard a changé. il est désormais remplie de colère, de haine. un sentiment que tu ne connais que trop bien. il te pousse violemment, souhaitant se dégager. tu te retrouves au sol également, ce qui lui laisse le temps de se redresser. seulement, il n'a visiblement pas ton sens du détail. tu le laisses s'approcher suffisamment de toi, avant de te redresser, un énorme bout de bois en mains. tu tournes légèrement ton buste pour prendre de l'élan avant de le frapper à la tête. il retombe aussi sec, bien assommé. tu profites de ce moment de répit pour t'enfuir. tu cours, cours. aussi vite de tes jambes te le permettent. tu ne sais pas exactement où tu vas, la forêt n'est pas ton point fort, mais peu importe. après quelques minutes d'une course effrénée, tu tournes la tête afin de vérifier que personne ne se trouve derrière toi. rien à signaler, à première vue. seulement, tu finis par heurter un obstacle, à ne pas regarder devant toi. si violemment, que t'en tombes par terre. encore. the hell? tu fronces les sourcils et poses une main sur ton front, un peu secouée. t'essaies de reprendre doucement tes esprits. au fond, ça te fait du bien de t'arrêter un peu, mine de rien. déboussolée, tu réalises seulement que l'obstacle en question est une personne. un homme, à en juger par la taille de ses jambes. ton coeur se met à accélérer. le sang ne fait qu'un tour. tu redresses doucement la tête, retardant le plus possible le moment de vérité. JESUS. FUCKING. CHRIST. YOU SCARED THE HELL OUT OF ME. la main sur ton coeur, tu lâches un soupir. ce n'était pas possible, de toute manière. il ne pouvait pas t'avoir rattrapé ainsi. mais après tout, il s'agit de glencullen. des tas de choses étranges se passent dans cette ville.

Il ne sait pas ce qu'il fait là. C'est stupide, même, mais il n'a jamais été connu pour faire des décisions rationnelles. Les rayons de la lune baignaient d'une lumière argentée son appartement. Ses yeux se sont posés sur l'astre, et il s'est senti appelé. Une sensation similaire à celle qu'il ressent lors des nuits de pleine lune, mais moins forte. Il aurait pu la combattre, mais il n'en avait tout simplement pas envie. Alors il est sorti. Sa rue est calme, seuls les lampadaires éclairent les trottoirs de leur faible lueur. Un coup d’œil à sa Mère, là-haut, et il sait que bientôt il devra sacrifier une nouvelle personne. Ce n'est qu'une question de jour avant que la Déesse ne réclame son dû, et il a hâte. Hâte de sentir l'énergie affluer à nouveau dans son corps, couler dans son sang. Il est comme un drogué en manque, son corps lui fait ressentir. Enfonçant un peu plus ses mains dans les poches de sa veste, Nolan avance, ignorant la brise froide qui lui caresse le visage. Glencullen est une ville morte, d'autant plus depuis les attaques sanglantes qui ont lieu il y a quelques jours. Les gens ont peur, peu sont suffisamment téméraires pour oser sortir hors de chez eux à la tombée de la nuit. Alors les rares personnes qu'il croise, à cette heure-ci, sont accompagnées d'une auréole blanche ou noire. Comme si seules les créatures surnaturelles étaient assez courageuses pour braver la dangerosité de la situation. Visiblement oui. Et si la magie du sorcier lui fait défaut ces temps-ci, la dague à sa ceinture suffirait à le protéger. Du moins, contre des loups, ou des chasseurs. Les Autres, Nolan sait très bien que c'est une cause perdue, mais il ne va pas cessé de vivre pour eux et leur faire ce plaisir. Bientôt, les immeubles et les maisons s'effacent pour laisser place à un paysage très différent. Le bitume et les pavés se transforment en sentier meuble. Son pas se fait discret, tandis que la terre et l'herbe rendent sa progression silencieuse. La forêt. Un sourire étire ses lèvres, il aurait dû s'en douter. Il est toujours inlassablement attiré par les bois de Glencullen, par la végétation qui entoure la ville. Il ne sait pas combien de temps il a marché, mais ses oreilles sont congelées, tout comme ses doigts. Mais c'est là qu'il doit être, il le sent. Elle l'a influencé à venir ici, à sortir de son petit appartement pour prendre l'air. Et la caresse des rayons lunaires sur son visage lui fait le plus grand bien. Il se sent plus vivant qu'il ne l'a été ces derniers jours, comme un léger regain d'énergie pour lui permettre de finir le mois. Chaque pas le mène un peu plus profondément dans la forêt, mais il n'a pas envie de s'arrêter, ni de faire demi-tour. L'heure est déjà bien avancée et il aurait presque envie d'assister au lever du soleil, sur les falaises proches de la ville. Le bruissement des feuilles le tire de sa rêverie. Un son sourd, qui lui apparaît très lointain au début, mais qui ne cesse de se rapprocher. Nolan s'immobilise, à l'affût de la moindre apparition. Une main sur sa dague, il est prêt à l'utiliser en cas de menace. Le bruit se rapproche et avant même qu'il n'ait le temps de réagir, une silhouette apparaît dans son champ de vision et se heurte à lui, tombant en arrière. Ses sourcils se froncent tandis qu'il détaille les traits de la personne à terre. Lorsque son visage se lève vers le sien, sa main relâche l'emprise sur sa dague, son corps se détend. Nerys. Malgré tout, l'expression de son visage ne change pas. Il n'est pas particulièrement heureux de la voir, mais pas non plus aussi énervé qu'il l'a déjà été auparavant. Il est juste perplexe, presque blasé. Leurs chemins se croisent, encore et encore, sans qu'il ne puisse y faire quelque chose. Un étrange sentiment l'envahie tandis qu'il se rappelle à quel point il avait besoin de sortir, un peu plus tôt. Dans son esprit, des questions se forment, mais il refuse de les analyser. Il les refoule, dans un coin sombre de sa tête. Mais une petite voix lui souffle que tout ça n'est pas dû au hasard. « JESUS. FUCKING. CHRIST. YOU SCARED THE HELL OUT OF ME. » Il lève une main en l'air tout en haussant les épaules, pour manifester qu'il n'y est pour rien dans cette histoire. Sa seconde main se tend vers la jeune femme pour l'aider à se relever. « Look at were you're going. » Toujours ce même ton neutre, froid qui reflète tout son rapport à la vie, en ce moment. Ses iris sont fixés sur la sorcière, qui se relève enfin. « Why were you running like a mad person? » Il réalise alors qu'elle était en train de courir comme si quelque chose la poursuivait. Son regard vient balayer la forêt derrière elle, à la recherche d'une quelconque menace qui pourrait surgir de derrière les arbres.

tu ne sais pas pourquoi tes pas t'ont guidé dans la forêt. sur le coup, ça te semblait une bonne idée. tu devrais peut-être réfléchir un peu plus souvent, avant d'agir. c'est tout sauf une bonne idée. tu ne connais pas la forêt. tu ne la connais plus. tes premiers sacrifices se sont déroulés ici, dans ces bois. quelques uns, pas tant que ça. t'as vite arrêté, abandonné. préférant la falaise dégagée aux arbres te protégeant. et paradoxalement, tu t'y sens plus en sécurité que jamais. tu ne sais pas pourquoi t'as d'abord été attiré par cet endroit. une mauvaise blague, surement. s'il y a bien une chose que tu as appris rapidement, c'est que votre mère n'hésiterait pas une seconde à vous faire du mal. tu lui en as voulu, longtemps. et puis t'as fini par passer à autre chose. au fond, tu n'es pas si différente d'elle. tu n'hésiterais pas à blesser ta propre famille, s'il le fallait. eilis. elle, tu serais capable de la tuer sans même te poser la question. votre mère est cruelle, mais peut-être que tu le méritais. ou peut-être qu'elle t'a rendu service. t'as souffert pendant des années, sans aucune raison. tu te sentais coupable pour ça. elle t'a donné une raison. une raison à ta souffrance, mais également à ta colère. elle a fait de toi ce que tu es aujourd'hui. il n'empêche que pendant des années, tu as évité la forêt comme la peste. non sans l'aide de thad, qui a fait en sorte que tu n'es pas à y aller, malgré le peu de temps depuis lequel vous vous connaissez. t'as fini par t'en rendre compte. il sait, et ça ne t'enchante pas vraiment. ces derniers jours, tu t'es retrouvée plus souvent ici que durant ces huit dernières années. comme si une force extérieure t'y poussait, sans que tu ne saches pourquoi. ton coeur retrouve un rythme normal, doucement. et malgré la peur qu'il t'a fichu, ça te fait un bien fou de voir nolan. plus les jours passent, et plus tu sombres. t'as besoin de lui. pas tout le temps, mais dans ces moments là, oui. tu regardes sa main un instant, sans bouger. pendant une fraction de seconde, tu hésites. avec un froncement de sourcil, tu réalises qu'il s'agit d'un geste banal. tu as simplement perdu l'habitude qu'il fasse un pas vers toi. tu l'attrapes et te redresses. look at were you're going. tu lâches sa main aussitôt, ne souhaitant pas t'éterniser inutilement. sa remarque te blesse, bien plus que tout ce qu'il ait pu te balancer jusqu'ici. la peur t'as empêcher de réaliser quelque chose. t'es à fleur de peau, prête à exploser à n'importe quel moment. une bombe à retardement qui arrive à la fin de son compte à rebours. why were you running like a mad person? tu te concentres sur ta respiration. ne pas retourner en arrière. ne surtout pas retourner en arrière. un étrange sentiment de culpabilité s'empare de toi. tu aurais dû le tuer. tu te sens coupable de ne pas l'avoir tué. un étrange concept. ton regard se dirige vers les yeux de nolan. tu te rends compte qu'il scanne les alentours. it's okay. you've got nothing to worry about. tu ne penses pas qu'il t'ait suivi. ça serait vraiment imprudent de sa part. et totalement idiot. puis, même si c'était le cas, la seule personne à qui il s'en prendrait serait toi. personne d'autre. à part nolan, il n'y avait personne, à vrai dire. tu fronces les sourcils une fois de plus, observant les traits du jeune homme. you didn't make a sacrifice, did you?

Nolan détaille la silhouette de Nerys, s'attarde sur les traits de son visage. Sa bouche est pincée, ses yeux sont brillants, même dans l'obscurité il parvient à le distinguer. Elle est crispée, tendue. Son souffle est erratique, irrégulier. Elle semble avoir bien du mal à se calmer. Il sent une mauvaise énergie émaner d'elle. Ça l'affecte, lui aussi. Les sorciers sont sensibles aux énergies de chacun. C'est étrange de la voir ainsi, elle qui a l'air tellement détaché de tout ce qui se déroule autour d'elle, d'habitude. Presque comme si elle était dans un autre monde, un qu'elle aurait créé et dans lequel elle se réfugierait pour échapper à la dureté de la réalité. Il a toujours pensé que quasiment rien ne pouvait l'atteindre, ce qui est stupide, en réalité. Car au fond, elle est comme lui, comme n'importe qui. Elle porte un masque d'indifférence, elle a su se construire une carapace convaincante, mais elle n'est pas infaillible. Elle est humaine, même si le mot semble mal choisi pour la décrire. « It's okay. You've got nothing to worry about. » Il a bien du mal à la croire, mais il hoche malgré tout la tête. Elle courrait comme si sa vie en dépendait. En plein milieu de la nuit, il se demande bien ce qui pouvait la pourchasser. Un loup peut-être, ou un chasseur. Mais dans ce cas, il aurait bien toutes les raisons du monde de s'inquiéter. Pourtant, il sent qu'elle ne ment pas. Elle est sincère quand elle lui dit qu'il n'a pas à être inquiet. La curiosité du sorcier est piqué au vif, il a envie d'en savoir plus. « You didn't make a sacrifice, did you? » Un léger sourire vient éclairer son visage. Ça l'amuse qu'elle puisse penser qu'il irait jusqu'à sacrifier des personnes, hors de la pleine lune. Pour dire vrai, il y a pensé, lorsqu'il a loupé le rituel, à la pleine lune précédente, mais il doute que ça ne soit très utile. Ça ne serait que de l'énergie gaspillée, probablement. Et Nolan abhorre le gaspillage, d'autant plus lorsqu'il s'agit d'une vie humaine. Si tuer ne le dérange pas, car une nécessité pour eux les sorciers, ça n'est pas non plus une passion qu'il irait exercer plusieurs fois par mois. Il sait que la Déesse ne cautionnerait pas non plus ces agissements, elle n'accepterait probablement pas son offrande.  « No, no. I was just... walking. » Le sorcier hausse les épaules, perplexe face à sa propre réponse. Il n'a pas d'explications à fournir pour sa présence ici, à part peut-être l'insomnie qui l'empêchait de trouver le sommeil. Et son instinct, qui lui soufflait de sortir de chez lui, de venir ici. Ses pas l'ont mené jusqu'aux bois sans même qu'il ait besoin d'y réfléchir. C'était naturel. Au fond, il n'a pas besoin de se justifier face à Nerys, mais ça le perturbe de ne pas pouvoir expliquer sa présence dans la forêt. « And you? What happened? The forest isn't usually your spot. » Si Nerys a quasiment tout d'une inconnue pour Nolan, qui ne connaît pas grand chose d'elle, il sait qu'elle n'apprécie pas la forêt. Elle préfère les falaises, avec la vue sur l'océan. Probablement le besoin de se sentir proche de son élément. Il n'en sait rien, mais ça attise d'autant plus l'incompréhension du sorcier concernant la présence de la jeune femme ici. Rien de tout ça n'est logique, en réalité.

no, no. i was just... walking. tes yeux posés sur nolan, tu ne cesses de le regarder. tu ne peux - tu ne veux - détacher ton attention du jeune homme. ça t'aide, un peu. ton corps se détend légèrement. ou du moins, t'as l'impression qu'il se détend. comme si te perdre dans ses yeux suffisait. si seulement. non, ça ne suffit pas. ce n'est qu'illusion. comme ta vie entière, au final. jusqu'à ce qu'un petit élément vienne briser ce mirage dans lequel tu vis. un homme, en l'occurrence. un complet inconnu. un humain. synonyme de faiblesse, de vulnérabilité, à tes yeux. tu ne pouvais pas plus te tromper. cette simple pensée de crispe de nouveau. et tu réalises que tes poings sont serrés. tu ne saurais dire depuis combien de temps. peut-être depuis le début. tu baisses les yeux un instant, le temps de prendre une bonne inspiration et de souffler. quelques secondes à peine. tu rediriges ton regard vers le visage du blond. tu détailles à nouveau ses traits, sans un mot. t'aurais voulu parler d'autre chose, parler de lui. le sujet n'était probablement pas le bon. que peux-tu ajouter d'autre? que ça passera, que la pleine lune arrive? autant ne rien dire du tout. et puis, il faut avouer que nolan ne s'est pas montré particulièrement bavard envers toi ces dernières semaines. une fois de plus, t'as même pu ressentir qu'il n'était pas des plus heureux de te voir. rien de nouveau. ça en deviendrait presque fatiguant. and you? what happened? the forest isn't usually your spot. and yet i've been here too many times during the last couple weeks. tu ne peux t'empêcher de te demander pourquoi il voudrait savoir. de la curiosité surement. rien de plus. tu te dois de garder les pieds sur terre, pour une fois. parce que les temps sont durs pour les rêveurs. tu essaies tout de même de déceler une faille sur son visage, la moindre petite chose. mais tu n'y arrives pas. ou tu ne veux plus, tout simplement. tu ne veux plus affronter la vérité. i guess i needed to isolate, finis-tu par lâcher, avant de poursuivre. someone once told me i was unconscious. par quelqu'un tu veux dire nolan, bien sûr. même si tu sembles tout prendre à la légère, tu analyses. tu prends en compte. tu rumines dans ton coin pendant des heures. alors peut-être qu'inconsciemment, ton cerveau t'a guidé dans la forêt pour pouvoir te laisser carte blanche. ou peut-être s'agit-il d'une force extérieure. la lune, qui t'aurait guidé sur les lieux du drame. ça ne t'étonnerait même pas, au fond. i don't want to be here anymore.. les larmes menacent désormais de couler à n'importe quel moment. la panique commence à refaire son apparition. visiblement, tu ne t'es toujours pas calmée. tu détournes le regard et croises les bras, recherchant un peu de chaleur. ou de réconfort. tu te tournes ensuite légèrement, en profitant pour observer les alentours. ça n'a pas le don de te rassurer, au contraire. tu n'as pas la moindre idée d'où tu peux te trouver.

Quelques secondes, leurs regards se croisent, ils se toisent. Nolan met un point d'honneur à ne rien laisser transparaître sur son visage. Rien que le masque d'indifférence habituel, qu'il a l'habitude de porter, comme un moyen de défense. Le sorcier s'est toujours dit que si personne ne réussissait à lire en lui, alors personne ne pourrait le blesser.  «  I guess I needed to isolate. » Il n'a même pas envie de remarquer que s'isoler, en plein milieu de la nuit, dans la forêt, n'est pas quelque chose de commun. Au fond de lui, il sait qu'elle ne lui dit pas la vérité. Et comment lui en vouloir? Pourquoi le ferait-elle, alors qu'il a passé les dernières semaines à essayer de la repousser? Il n'a même pas réellement envie de savoir, en fait (ou c'est ce dont il essaie de se convaincre, pour rassurer son inconscient). Alors il ne cherche pas à insister, se contente de hocher la tête avant que Nerys ne poursuive. « Someone once told me I was unconscious. » Ces paroles lui arrachent un sourire, qui disparaît assez rapidement alors que les souvenirs lui reviennent. Nolan se souvient très bien de lui avoir dit ça, durant une nuit de pleine lune, sur les falaises. Les images sont claires dans son esprit. Il se rappelle de la sensation qui l'avait envahi, il se rappelle des cris qu'il avait associé à ceux de sa sœur. Les cris qui lui avaient percé les tympans, qui avaient accéléré les battements de son cœur. « I still think you are. » Mais est-ce vraiment un défaut? Elle est inconsciente, certes, mais elle est aussi très débrouillarde. Il a rarement vu quelqu'un s'en sortir de la sorte, et ce malgré les situations dans lesquelles elle se met. Si une personne est capable de se défendre et de se débrouiller seule, c'est bien elle. Alors il n'a pu s'empêcher d'être surpris de la voir venir, échevelée et nerveuse, comme si elle avait fait une mauvaise rencontre. « I don't want to be here anymore.. » Ça le frappe, de la voir comme ça. On dirait presque une enfant, perdue et vulnérable. Les bras refermés sur sa poitrine, elle a l'air petite. Ses yeux ne cessent de scanner les alentours, comme si quelque chose allait surgir de derrière les bois à n'importe quel moment. Elle est bien loin, la jeune femme forte qu'il a l'habitude d'avoir en face de lui. Et même s'il se persuade du contraire, ça le touche. Elle réussit à toucher son cœur de glace, à percer l'armure qu'il s'est construit il y a quelques années. « Come on, I'm getting you out of here. » Avant même qu'il ne puisse y réfléchir, Nolan fait un pas vers Nerys et passe un bras dans son dos, pour l'entraîner dans la bonne direction. Rapidement, son cerveau l'alarme, lui signale que ce qu'il fait est dangereux. Alors après quelques mètres, son bras retombe le long de son corps, tandis qu'il marche à côté d'elle, ses iris fixés devant lui. « The forest is so... peaceful, I think. But it can be tricky, when you don't know her. » Les mots franchissent la barrière de ses lèvres pour rompre le silence oppressant. D'ordinaire, l'absence de mots ne dérange pas Nolan, mais il sent que la sorcière a besoin de se concentrer sur autre chose que son propre malaise.

tu ne t'étais pas sentie aussi vulnérable depuis bien longtemps. tu n'aimes pas ça. du tout. t'as passé tellement de temps à te construire, te forger. devenir la femme que tu es aujourd'hui n'a pas été facile. il a fallut énormément de travail. tu ne te voiles pas à la face, cependant. il s'agit juste d'une carapace. tu es toujours cette petite fille seule et perdue. mais tu tiens à cette carapace. elle te protège, te rend forte. alors voir que tout peut voler en éclat en une fraction de seconde, ça ne t'enchante pas vraiment. tout semble si fragile. tu sembles si fragile. i still think you are. tu plonges tes yeux un peu trop expressifs dans ceux de nolan. et soudainement, un léger sourire vient adoucir ton visage. well, thank you. ce n'est pas un compliment en soit, mais tu le prends comme tel. l'inconscience est la chose qui te définie le mieux. c'est ce qui te rend toi. sans elle, tu ne ferais probablement pas la moitié de ce que tu fais. tu ne serais pas toi. et au fond, tu réalises à ce moment précis que tu ne veux pas changer ça. peu importe dans quoi ça peut bien te fourrer. peu importe si ça te conduit à ta fin. à vrai dire, t'aurais préféré mourir ce soir, plutôt que de te replonger dans des souvenirs douloureux. souvenirs qui t'ont - et continuent de - te briser. ton sourire se crispe à cette pensée. un sourire plus forcé, avant qu'il ne disparaisse. tu fuis désormais le contact visuel. tes yeux viennent balayer le sol. come on, i'm getting you out of here. son bras vient dans ton dos. pour te diriger, te guider. un geste simple, innocent. pourtant, ça te fait du bien. même la plus petite des attentions compte. d'autant plus lorsque c'est instinctif, non contrôlé. tu le sais, parce qu'il ne peut s'empêcher de rompre ce simple contact. tu resserres l'étreinte de tes propres bras autour de toi. the forest is so... peaceful, i think. but it can be tricky, when you don't know her. avançant dans le froid, tu hoches doucement la tête. tricky, yeah.. you don't pay attention for like- ten seconds and you're screwed. tu ne le sais que trop bien, malheureusement. elle te semble bien loin, l'époque où tu aimais la forêt. nolan ne s'est probablement pas lancé sur la meilleure piste, mais t'apprécies tout de même l'effort. i used to make my sacrifices here. a very, very long time ago. tu tournes la tête pour le regarder. un sourire vient se nicher sur tes lèvres. un sourire sincère. but you don't want to know. ou tu ne veux pas qu'il sache. parce que t'as l'impression que tu pourrais tout lui dire de toi. et au fond, tu n'en as pas envie. tu n'en dévoiles jamais trop. tu préfères ne pas être appréciée par ce que tu sembles être, plutôt que par ce que tu es réellement. alors tu ne veux pas prendre le risque qu'on se détourne de toi à cause de ce que tu pourrais laisser échapper. et au fond, une toute petite, minuscule part de toi ne veut pas que nolan apprenne à te connaître. cette part de toi te chuchotes doucement qu'il a raison de garder ses distances, que tu devrais arrêter de l'en empêcher.

Les feuilles des arbres sont secouées par la légère brise, leur bruissement se heurtant au silence qui s'est installé pendant quelques secondes à peine entre eux. Un mutisme que vient briser Nerys, d'une voix faible, presque un murmure. « Tricky, yeah.. You don't pay attention for like- ten seconds and you're screwed. » Nolan a l'impression de s'être aventuré sur un terrain glissant, de ne pas avoir choisi le bon sujet de conversation. Il aurait dû s'en douter, en réalité. C'est stupide de la lancer sur la forêt et sa dangerosité alors qu'elle souhaite à tout prix en sortir. Mais voilà, le sorcier ne fait pas partie de ces personnes qui savent s'y prendre avec les autres. Les mots se forment sur ses lèvres sans aucun filtre et souvent il est déjà trop tard pour regretter ses paroles. Alors il a appris à ne rien regretter de ce qu'il disait, mais d'assumer au contraire. « I used to make my sacrifices here. A very, very long time ago. » Une révélation qui pique sa curiosité. Il ne peut s'empêcher de se demander ce qui l'a bien poussé à quitter la forêt pour se réfugier sur les falaises. Nolan se sent en sécurité ici, il ne saurait expliquer pourquoi. Ces bois ont abrité beaucoup d'horreurs, à commencer par le meurtre de sa propre sœur, mais pourtant il n'arrive pas à s'en détacher. Peut-être parce que c'est ici que tout a commencé (et que tout c'est terminé aussi, d'une certaine façon). Ce sont ces même arbres qui ont été témoin de sa transformation, de son changement de vie. Alors au fond, malgré tout, il sait qu'il ne pourra jamais se détacher de cette forêt. C'est étrange, une affection pour un tel lieu. Le sorcier ne pourrait probablement pas mettre de mots sur son ressenti, mais il sait, voilà tout. « But you don't want to know. » Ses iris croisent les yeux de Nerys alors qu'un sourire étire les lèvres de la jeune femme. « No I don't. » Non, il n'a pas envie de savoir, mais pas pour la raison qu'elle soupçonne. Il ne veut pas savoir car ça signifierait apprendre à la connaître et probablement apprécier ce qu'il découvrirait. Car ça signifierait commencer à se soucier pour elle, car ça signifierait offrir l'opportunité à une personne supplémentaire de l'abandonner, un jour. Et au fond, il a le pressentiment qu'il n'apprécierait pas ce qu'il entendrait, car il sent qu'il y a bien plus derrière cette histoire que ce qu'elle laisse paraître. Alors Nolan se contente de regarder devant lui, alors qu'il continue à marcher d'un pas assuré, sans prendre la peine de préciser le fond de ses pensées. Il lui a offert la réponse qu'elle attendait après tout. « I think my cat is gonna be pissed at me. » A ce moment précis, il se demande sérieusement où est-ce qu'il souhaite en venir avec cette annonce tout à fait inutile. C'est ridicule, stupide, mais il avait besoin de dire quelque chose, de combler le silence qui commençait à l'oppresser. Alors il a pensé à Salem, qui devait probablement attendre qu'il rentre pour pouvoir dormir contre lui. Un soupir échappe à Nolan alors qu'il repense à cette phrase dénuée de sens. Comme une réponse à son désespoir, l'orée des bois apparaît devant eux, lui offrant une porte de sortie sur la situation dans laquelle il s'est mise. « You see, we're out. We weren't that far. »

no i don't. le léger sourire accroché à tes lèvres s'élargit un peu plus, illuminant d'avantage ton visage fermé jusqu'ici. comme s'il s'agissait d'une réponse positive. mais ce n'est pas le cas. il ne cherche pas à te ménager. il ne prend pas de gants. il est nolan. fidèle à lui-même. et au fond, c'est peut-être ce dont tu as besoin. ne pas être vu comme une petite chose fragile, même si ça peut paraître compliqué au vu de la situation. tu n'es pas fragile. tu n'es pas une petite chose. tu es une femme forte et indépendante qui s'est construite seule au cours de ces années. fierté à deux balles. mais tu te dois de la garder précieusement, de la chérir. sans elle, l'entièreté de ta forteresse s'écroulerait. tu ne peux pas le permettre. tu ne peux pas laisser un petit incident te faire douter. peu importe à quel point les souvenirs sont douloureux. tu as appris avec le temps que la mémoire fonctionne bizarrement. en réalité, lorsque l'on pense à quelque chose, on pense à la dernière fois à laquelle on y a pensé. which is, so fucked up. c'est pourquoi les souvenirs s'effacent petit à petit, sont de plus en plus flous. and yet, here you are, huit ans après, toujours effrayée et perdue. telle une enfant que tu n'es plus (que tu es toujours). peut-être bien que ça ne fait plus mal, en réalité. peut-être bien que tu t'infliges une souffrance imaginaire. parce que t'en as besoin. parce que tu le mérites. i think my cat is gonna be pissed at me. tu réalises que ton regard a dévié – tu ne saurais dire à quel moment. et que tu t'es une fois de plus enfermée dans ton mutisme – ce que tu fais rarement. si ce n'est lorsque tu es en colère. parfois. quand tu n'as pas la force de crier. tu n'es pas en colère. tu ne l'es plus. tu es lasse, vidée. fatiguée, non pas physiquement, mais moralement. ce n'est pas bon signe. ce n'est jamais bon signe. tu te connais bien trop pour te dire que ça passera. essayer de te rassurer (de te mentir) ne changera rien. il te faut une distraction. et même si vous n'avez rien à vous dire – vos remarques ne conduisent pas à une réelle discussion, après tout – il en fait une bonne. c'est suffisant. il pourrait même se contenter de garder le silence, que ça t'irait. he's more than good enough. tu tournes la tête en sa direction, mais ne le regardes pas pour autant. et avant que tu n'ais pu réfléchir à ce que tu fais, ta main se glisse timidement dans la sienne. tes doigts s’entrelacent aux siens avec une douceur presque innocente. comme s'il s'agissait d'un geste banal, naturel. comme si nolan ne passait pas son temps à mettre un point d'honneur à te repousser. you know, it's kinda hard to believe you're a cat person. tu lèves les yeux pour scruter les traits de son visage, encore une fois. tu n'y avais pas pensé jusqu'ici. parce que tu ne possèdes pas d'animaux, rien. mais si tu l'avais fait, tu n'aurais pas pensé à un chat. et encore moins qu'il pourrait en parler de cette manière. une simple phrase. et pourtant tu trouves que tellement s'en dégage. ça a une certaine tendresse. posséder un chat a une certaine tendresse. de ton point de vue, du moins. non pas que nolan ne soit pas tendre. il pouvait l'être. il l'a été, il fut un temps. un temps qui remonte à une éternité, t'as l'impression. un léger rictus s'accroche à tes lèvres – presque imperceptible, face à son malaise apparent. t'as envie de lui demander pourquoi. t'as envie de lui poser des tas de questions, à vrai dire. à commencer par le fait qu'il se trouve dans les bois à une heure aussi tardive. mais t'as le sentiment que ça ne servirait pas à grand chose, que tu n'aurais pas plus de réponses que ça. et bientôt, les arbres se volatilisent. you see, we're out. we weren't that far. tu ne peux qu'hocher la tête à cette affirmation. vous n'étiez en effet pas si profondément dissimulés. tu te sens quelque peu stupide, d'avoir autant perdu tes moyens pour pas grand chose, au final. mais tu ne peux pas dire que ça te surprenne. t'as tendance à te laisser emporter. même si en temps normal, tu ne te laisses pas atteindre par la peur. tu ne te laisses pas atteindre par quelqu'un – encore moins un homme. pas comme ça. tu baisses les yeux, laissant échapper un soupire que tu n'avais pas réalisé que tu retenais. now.. are you going to leave me? again. tu ne sais même pas d'où ça sort. ou même ce que tu attends. tu n'as plus besoin de lui pour retrouver ton chemin à présent. et tu ne veux pas non plus t'attarder plus que ça.

Ces iris scrutent les alentours, à l'affût du moindre bruit, du moindre détail qui ne serait pas à sa place. Il se concentre là-dessus, probablement pour oublier la présence de Nerys à ses côtés. Mais bientôt, la main de la jeune femme vient se glisser dans la sienne. Le contact de leurs paumes est glacial, électrifiant. Comme deux opposés qui s'affrontent, le feu et la glace qui se rencontrent dans un chaos poétique. Les doigts de la brune sont gelés, presque brûlants contre la peau du sorcier. Une sensation qu'il ne connaît pas vraiment, lui qui n'a jamais ressenti la brûlure des flammes, lui qui ne ressent qu'une caresse lorsqu'il plonge sa main dans le brasier. Quelques secondes, le contact de leurs mains le déstabilise. Ça ne lui ressemble pas, lui qui fait d'ordinaire preuve d'assurance. La proximité physique ne l'a jamais perturbé, il en a même l'habitude. Mais là, juste durant quelques secondes, il ne sait pas quoi faire. Il se surprend même à se dire que la main de Nerys correspond parfaitement à la sienne. Son regard glisse vers leurs doigts entrelacés, vers cette promesse d'un avenir différent. Tout ce que représente ce simple geste, toutes les possibilités qu'il pourrait leur offrir. C'est trop pour Nolan, trop pour son cœur de glace et son esprit bien trop rationnel. Quelques secondes à peine, mais qui semblent durer une éternité pour le sorcier. Quelques secondes qui s'écoulent entre le moment où la sorcière glisse sa main dans la sienne et l'instant où il se décide à se dégager de cette étreinte. Il ne prend même pas la peine de commenter, préfère se dire que le silence est préférable dans ce genre de situation. Le silence pour manifester son désintérêt, sa lassitude. Ou plutôt le silence pour camoufler le fait que, pour une fois, Nolan est à court d'arguments et de remarques assassines. Ce soir, il n'est pas d'humeur à se lancer sur ce chemin. « You know, it's kinda hard to believe you're a cat person. » Nolan hausse doucement les épaules. La question ne s'est jamais posée pour lui. Il a eu un chat, durant son enfance. Il n'a jamais eu de chien, et n'en veut pas à vrai dire. Il  a toujours été intrigué par les félins, leur calme et leur majestuosité. Créatures de la nuit, tout comme lui. Peut-être qu'au final il s'est toujours senti proche de ces animaux car il leur ressemble, tout simplement. « I'm like the cliché of the witch with the black cat. Except that Salem is grey. » Si Nolan voulait combler le silence qui le rendait mal à l'aise, cette discussion commence à provoquer le même genre de sentiment chez lui. Il n'a jamais été un adepte du parler pour parler, pourtant c'est clairement ce qu'il est en train de faire. Ainsi, la vue du ciel dégagé, des étoiles et du croissant de lune fut plus un soulagement que d'ordinaire. Il était satisfait de laisser derrière lui l'obscurité de la forêt pour bientôt retrouver les lampadaires et les néons des échoppes. Laisser derrière lui Nerys, sans culpabiliser de l'avoir laissé dans les bois, dans un environnement qu'elle ne connaît pas autant que lui. D'ordinaire il s'en serait probablement fichu, mais  il avait appris à se soucier d'elle, d'une certaine façon. La présence envahissante de la jeune femme dans sa vie commençait à laisser des marques très déplaisantes pour le sorcier. « Now.. Are you going to leave me? » Son regard est rivé sur le sol. Tout ça ne lui ressemble pas, c'est si inhabituel comme comportement chez elle que ça perturbe Nolan. Lui qui a l'habitude d'avoir en face de lui une femme forte, qui lui tient tête, il a l'impression d'être en présence d'une enfant perdue désormais. Il se répète en boucle que c'est pour ça qu'il n'est pas encore partie, que ça ne représente rien de plus que de la pitié, en quelque sorte. Un cadeau qu'il lui ferait, de ne pas l'abandonner à son sort. Mais la voix qui murmure ces paroles dans son crâne n'est pas aussi forte qu'il le souhaiterait. Une autre, bien plus imposante, essaye de se frayer un passage dans ses pensées. Il lutte, cherche à la repousser dans un coin sombre de sa tête. Cette voix qui prend de plus en plus d'importance, au fil des jours, au fil des rencontres avec Nerys. Il déteste cette voix. Un soupir lui échappe à son tour, tandis que ses mains trouvent leur place dans les poches de son jean. « I'm not gonna walk you home, if that's your question. » Même sa compassion à des limites. Un nouveau regard vers l'orée de la forêt, puis ses iris se posent sur la jeune femme. Il hausse à nouveau les épaules, gardant ce comportement nonchalant qu'il a adopté il y a quelques années déjà. « But I guess we're going in the same direction for now. » Une invitation déguisée à le suivre pour le moment, jusqu'à ce que leurs chemins doivent se séparer lorsqu'ils seront en ville. Alors sans attendre de réponse de la part de Nerys, Nolan commence à marcher en direction du centre. Il n'a pas besoin de se retourner pour savoir qu'elle le suit. Il arrive à sentir sa présence près de lui, comme s'il s'y était habitué.

la terre laisse place au bitume. les arbres laissent place aux batiments. un sentiment de soulagement te parcourt. si bien que tu ne réalises pas tout de suite que ça signifie que vos chemins sont sur le point de se séparer. voilà d'où vient cette question. t'es encore troublée de ce qu'il vient de se passer. tu ne comprends pas comment une simple soirée peut virer au cauchemar en une fraction de seconde. et pourtant, ça continue d'arriver. encore et encore. tu devrais être habituée, à force. mais tu ne vois que le bien. partout. chez tout le monde. ça te conduira probablement à ta fin, un jour. i'm not gonna walk you home, if that's your question. tu redresses la tête, dirigeant ton regard vers nolan. changement de décor, changement de comportement, tu supposes. ça t'arrache un léger sourire, te réchauffe un peu. il est de nouveau lui-même. ça ne te dérange pas le moins du monde. t'es habituée à ce comportement qu'il adopte à chacune de vos rencontres. c'est devenu normal, pour toi. ce qui n'est pas normal, c'est la manière dont il a agit, dans la forêt. rien ne l'obligeait à se montrer si compatissant à ton égard. parce que oui, il l'a été. t'étais si enfermée dans tes propres émotions que tu n'as pas remarqué. tu n'as pas pris la peine de porter ton attention sur lui. pas autant que d'ordinaire. tu ne l'as pas sur-analysé. ou essayer de le faire. pourtant il t'a montré une autre facette de sa personnalité. une dont tu soupçonnais la présence, qui plus est. il te l'a finalement montré. inconsciemment, certes. mais ça ne change rien. he's a way better person than what he shows. or thinks, maybe. tu le savais. tu l'as toujours su. t'as vu quelque chose en lui. tu te le répète constamment, parce qu'il s'agit de ta seule explication. il n'y a rien qui pourrait justifier ton comportement vis à vis de lui. absolument rien. yeah, it was definitely my question. and then i will invite you in my apartment for a last drink, if you know what i mean. ton sourire s'efface, bien qu'il fut faible. les mots sont sortis avant même que tu n'ais pu y réfléchir (encore). changement de comportement radical pour toi aussi, visiblement. bien que ce genre de situation arrive souvent — tu ne peux plus nier ta façon de toujours agir sur le moment — tu te sens un peu gênée. comme si ça ne collait pas. comme si ça ne collait plus. c'est surement le cas, ce soir. tu t'es montrée si faible et vulnérable — tu te détesteras demain, après avoir repassé la scène en boucle pour le reste de la nuit — que tes propres mots sonnent faux. sensation étrange. you can feel (most of the time) sorry for your feelings, but never for your words. tu te retiens de te pincer les lèvres, préférant simplement détourner le regard. tu n'as pas envie de jouer à ce jeu, à vrai dire. nor the charming one. but i guess we're going in the same direction for now. effectivement. en soit, vous n'avez pas vraiment le choix. ta question te parait plus stupide encore. tu ne pensais pas que ça pouvait être possible. ton visage se crispe. maintenant que tous les mauvais souvenirs, que tous les sentiments de peur et panique s'envolent, un autre fait son apparition. il était déjà présent, mais il grossit. grossit. grossit. la frustration. tu réalises que toi aussi tu as montré une autre facette de ta personnalité. une part de toi que tu n'apprécies pas, qui ne colle pas à la carapace que tu t'es bâtie. une part que tu ne souhaites montrer à personne. pas même nolan, même si ça t'a fait du bien de tomber sur lui. même si tu n'aurais voulu tomber sur personne d'autre. même si t'aurais voulu ne tomber sur personne tout court. thank you, for walking me out of this. out of this shit. out of my old demons. tu te contentes de le suivre. tu ne cherches pas à venir à sa hauteur, comme tu as pris l'habitude de le faire. pour marquer ta présence. montrer que t'es là. ça ne sert à rien. ça ne marche pas, de toute façon. mais tu tiens tout de même à la remercier. par principe, bien que ça te coûte. ça te coûte qu'il puisse te penser faible, qu'il puisse te voir différemment. ça ne changera rien à votre relation, pourtant. t'en es bien consciente. parce que rien ne vous unis. vous n'êtes rien l'un pour l'autre. ça commence à prendre de plus en plus de place. doucement, la réalité te rattrape. à chaque fois que tu lui adresses la parole, à vrai dire. tu finiras bien par te le mettre en tête, un jour ou l'autre. que tu sois prête à l'accepter ou non. it was kind of you. un murmure à peine étouffé. comme s'il s'agissait de mots tabous. comme si tu craignais sa réaction (ce qui n'est pas le cas. tu ne le crains pas. jamais). tes yeux se posent sur nolan, bien qu'il te fasse dos. tu ne sais pas combien de temps ce — ton — petit jeu va encore durer, alors t'en profites pour essayer de te greffer son image en tête.

Les lampadaires éclairent d'un faible halo la rue, le bitume sous leurs pieds. Pour Nolan, la vision des ruelles désertes, balayées par le vent, est bien plus lugubre que l'obscurité de la forêt. Le silence qu'il a pu trouvé reposant dans les bois ne l'est plus désormais. Il ne s'agit pas de crainte, juste de malaise qu'il a toujours ressenti la nuit, seul, en pleine ville. Il y a quelque chose de beau dans les néons et les lumières des grandes métropoles, mais le néant des petites villes, l'absence de vie, ne crie qu'au danger. « Yeah, it was definitely my question. And then I will invite you in my apartment for a last drink, if you know what I mean. » Le regard de Nolan se pose sur la silhouette de Nerys. Le léger sourire qu'elle arborait il y a quelques secondes a disparu de son visage, remplacé par une moue contrariée. Il n'est plus étonné par les changements de comportement de la jeune femme. A vrai dire, il n'est pas mieux lui-même. Sans prévenir, le sorcier passe du chaud au froid, du sourire au rictus exaspéré. Un simple mot, une phrase mal placée, et son comportement change. Mais pour le coup, même s'il a toujours été agacé par l'attitude de Nerys envers lui, il préfère la voir ainsi que l'image qu'elle lui a renvoyé dans la forêt. Cette Nerys ne lui ressemble pas, et pourtant il a compris qu'il s'agit de la part d'elle-même qu'elle dissimule avec précaution derrière la carapace qu'elle s'est construit. Au fond, même si Nolan ne connaît pas grand chose de la jeune femme, il sait très bien qu'elle n'irait pas jusque là. Il aurait pu décider d'emprunter ce chemin, de passer une nuit avec elle et de ne plus jamais la revoir. Il ne l'a pas fait, car elle n'a jamais inspiré ce genre de sentiments chez lui. C'est peut-être pour ça que le blond s'est fait un point d'honneur à la fuir depuis toutes ces semaines. C'est peut-être pour ça qu'il a volontairement cessé de répondre à ses messages, car il savait. Nerys n'est pas le genre de femme avec qui on passe une nuit et qu'on oublie aux premiers rayons du soleil. Elle fait partie de ces personnes avec qui on échange des souvenirs, avec qui on partage des déjeuners, des éclats de rires, des coups de gueule. Ces personnes dont on effleure la peau, dont on chérit le corps. Elle fait partie de ces personnes qu'on aime, de toute son âme. Toutes ces personnes que Nolan évite avec minutie pour ne jamais se retrouver à leur faire face, pour ne jamais se retrouver piéger dans leur toile. Car les sentiments l'effrayent, car l'amour est un terme qui lui est étranger. « Not interested. » Des mots qu'il murmure dans un souffle, plus adressés à sa propre conscience qu'à la jeune femme près de lui. Il ne s'agit même pas d'une tentative pour la blesser ou la vexer. Pour une fois, il ne pense qu'à lui, ne pense qu'à faire taire la voix qui résonne comme une brise dans son crâne. Si légère, et pourtant il a bien du mal à l'ignorer. Les iris du sorcier sont fixés devant lui, ne prenant même pas la peine de s'attarder sur les détails de la ville. « Thank you, for walking me out of this. » Il ne souhaite pas qu'elle le remercie. Il n'a pas envie qu'elle lui soit reconnaissante, qu'elle pense lui devoir quelque chose. Il se soucie bien peu d'avoir sa gratitude. Il a choisi de la sortir de là car ça semblait être la chose à faire, à ce moment. La laisser seule dans cette forêt, ça aurait été plus que de la méchanceté, ça aurait été de la malveillance. Et si Nolan est parfois compliqué à comprendre, s'il est parfois blessant et dur, il n'est pas pernicieux. « It was kind of you. » Les mots que le sorcier ne désire pas entendre provenant des lèvres de la brune. Kind. What a joke. S'il n'est pas rare que ce mot soit employé pour le décrire par des personnes qui ne connaissent de lui que le côté souriant, accessible qu'il laisse transparaître aux premiers abords, il ne l'a guère entendu provenant de quelqu'un qui a su sonder son âme. Haussant les épaules, Nolan ose glisser son regard vers Nerys l'espace de quelques secondes. « It's nothing, don't thank me. » Il ne s'agit pas de fausse modestie ou quoi. C'est sincère, il le pense. Bientôt le silence s'installe à nouveau entre eux, uniquement perturbé par le bruit de leurs pas et de leurs respirations entremêlées.