Il ne sait plus depuis combien de temps il lui a filé entre les doigts. L’horreur. La bête de foire. L’objet des obsessions, celui qu’il crève de retrouver pour achever l’œuvre, pour ne pas laisser de survivant dans le sillage. La bête à tuer. Le chien à crever. Lui qui se fait passer pour l’un d’entre eux, la raison pour tuer, pour calmer les envies de carmin qu’il ne sait contrôler. La trace qu’il a fini par retrouver. Faiblesse pour lentement le tuer, le ronger. Obsession au fond de la caboche malade. Le corps volé. Le corps brisé et les marques posées sur la peau, sur le loup enchainé. Trop de temps à ses côtés à laisser la pulpe des doigts l’opérer, le bousiller. Fascination qui a fini par faire son apparition, laissant entendre l’orchestre infâme au fond du torse, la symphonie de folie pour un autre. Le cœur déviant, les battements indécents. Des années. Des mois. Trop de seconde accumulée à chercher la trace, à remuer le passé et la connerie d’avoir laissé la porte de sortie. Il a filé le loup. Il a filé entre les phalanges habiles du tortionnaire. Le tueur du clan.
Un endroit qu’il trouve pour filer, pour se faufiler. Des heures qu’il erre, qu’il laisse les pas s’imprimer dans le sol, qu’il laisse ses billes sombres observer la silhouette. Le corps marqué. Les cicatrices pour marquer la peau adorée. Les phalanges qui s’enfoncent au fond des poches et le dernier client qui fou le camp, lui qui réussit à se faufiler dans le musée. Le retrouver. Achever la bête qui tient encore debout, qui ne mérite que de se retrouver sous terre avec le reste de sa famille. L’écho des pas. Les billes qui se posent sur les divers œuvres qui trainent entre les couloirs sombres. La lame qu’il garde pour tuer les horreurs. La lame qui dort. Il se trouve un endroit Hasan, les peintures affichées pour attirer l’attention. Lui qui sait admirer. Lui qui sait apprécier. Lui qui sait jouer des notes de porcelaine, mais le talent caché qu’il n’ose pas montrer. Il se laisse tomber, les mains avides de retrouver cette obsession éclipsée, de reprendre ce qui lui a été dérobé. Il ne sait pas que la mémoire à effacé la moindre trace de leur passé. Il ne sait pas que l’homme ne pourra pas l’identifier comme le tueur du clan massacré. Il attend.
Les pas qui finissent par se faire entendre. Il ne devrait pas être là. Surement que le gardien de musée tentera de le chasser. C’est lui qui chasse. C’est lui qui prend. C’est lui qui laisse filer le carmin entre les mains, la pulpe de doigts. Les billes sombres qui détaillent les coups de pinceau. Les billes sombres qui filent sur la toile qui se trouve devant lui et les pas qui approchent. Les pas qui se font entendre de plus en plus. La respiration à lui qui vacille. Cette excitation de terminer l’œuvre, de décimer le clan à jamais. La raison de sa venue. Surement. Ou cette envie de le revoir, de le faire sien, de le posséder. Non. Impossible. Le cœur déviant qui ne sait pas aimer. Qui ne sait battre que pour cette envie de carmin versé. L’ombre qui apparaît. Il ne bouge pas. Les mains croisées. Le cœur habité par cette folie qu’il ne sait contrôler. Lui le jouet. Lui le précieux. Lui qui lui appartient. Hors de question de le laisser filer encore une fois. Briser la peau. Terminer ce qui n’a pas pu être achevé à cause d’un moment de faiblesse.
(c) AMIANTE
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Sujet: Re: (nehemiah) folie douce Mar 3 Mai - 18:39
folie douce
Le temps. Impalpable. Il lui file entre les doigt comme la poussière qui recouvre les pièces du musée, s'écoule dans son sablier d'un flot ininterrompu, des œuvres oubliées perchées à des clous comme accrochée sur une potence, aux yeux de douce leur lente agonie, leurs cicatrices ouvertes, craquelures que le temps à creusé dans leur peau douce, effacé la vie qui pulsait dans les corps inanimés, des années pour restaurer des portraits de personnes trépassées, redonner un peu de gloire à ce qui n'a plus raison d'autre. La sélection naturelle fait son oeuvre, quand il n'y aura plus assez de fous pour admirer le passé elles tomberont dans l'oublis, s'il reste encore quelque chose sur les cadres. Dans son désir d'immortalité, l'homme voudrait emporter ses biens qu'il fait de matériaux altérable. Il a sans doute peur de se rendre compte qu'il est fait de la même matière. Qu'il est cruellement vulnérable, lui aussi sujet sur un échiquier, voué aux griffes pourpres, la seule différence c'est que personne ne viendra l'enfermer dans du verre. Ce serait plus que mal vu, de paradoxe en paradoxe elle avance l'humanité. Il a préféré s'en écarter.
Nehemiah, comme les tableaux, une bête de foire, le rôdeur qui ne sort que la nuit pour échapper aux rêves, altéré, aux couleurs effacées, il a perdu son peintre, l'a fuit, c'est tout ce qu'il sait, le reste du temps il n'est qu'un marcheur paisible, aussi silencieux que les statues, ça encourage encore plus les mythes monstrueux qui se dessinent dans les lèvres acides des racontars de couloirs. S'il pouvait leur couper la langue pour récupérer leurs mots et réécrire l'histoire de sa vie il le ferait, la recherche de souvenirs est constante, elle commence à travers les scènes d'horreurs des peintres et jamais elle ne s'arrête, la sarabande se déhanche jusque dans les songes, les envolées oniriques ne connaissent qu'une seule noirceur. Mais on ne vole pas les mots des autres, surtout quand ceux-ci sont trop disgracieuse pour avoir ne serait-ce qu'un léger intérêt. Il n'y a que les murs pour le retenir, il pourrait s'enfuir encore, quand le ciel se fait encre, qu'il coule sur l'azur en un sang obsidienne l'envie de prendre ses jambes à son cou s'embrase. Il y a des sorcières à brûler dans le coeur du condamné. Il cherche, chien de garde. Loup de garde. Prêt à sauter à la gorge des non désirés.
Il se tient là devant lui, le détour d'un couloir, l'habitude des lieux qui fait de chaque présence une anomalie. Il n'a pas besoin de tourner en rond pour savoir si quelqu'un s'est introduit sans y être invité, il tourne comme un fauve dans sa cage parce qu'il doit taire les pensées, il doit réfléchir, ne pas se concentrer sur la fatigue, ne pas se concentrer sur le vide, non, il faudrait qu'il y plonge. C'est une spirale, tel un serpent se mordant la queue, il avance, il recule, il saute, il plonge et se ravise. C'est la dance macabre de l'oublie. « Vous ne devriez pas être là. » S'entend à peine parler le loup. Deux être en un, in instinct pour deux, cohabite les identités, l'une volée, l'autre saccagée. Outragées. Ce qui retient la bête c'est l'allure, l'air de déjà vu s'échappe aussi vite qu'il est venu, il se cache, les sirènes hurlent mais ne reçoivent pas de réponse. Peu de gens veulent passer la nuit dans une galerie, voler est toujours une option mais il n'y a ici rien de bien précieux comparé aux grands musée. Sûrement que rien ne manquera à personne. Ca fera un coup de pub pour le coin, attiré les badauds comme à a lueur d'une cheminée, ils aiment voir s’affronter les autorités et les fripouilles, soif de chair, soif de sang et d'encre. Les journaux parlent d'eux même. C'est incongru qu'un homme comme lui s'attarde. Il ne cherche pas à comprendre ni a réfléchir. « Je vais appeler la police. » Menace mais ne fera pas. Il n'a pas son portable sur lui, grave erreur. Avec un peu de chance ça suffira. Non, affirme la voix dans sa tête. Il se donne bonne conscience pour ne pas avoir que la curiosité guide sa langue.
Il fait un pas de plus, claque contre le carrelage les vielles bottes, l'air minable à coté de l'apparition presque spectrale, sortie droit des peintures aux coups de maîtres. Il braque la lumière hasardeuse d'une lape sur le visage coupé au couteau, tranché dans le marbre. Déjà vu. La bête rampe dans l'estomac. « Je vous laisse une chance de vous expliquer. » Tout sonne très faux. Ce sont des phrases comme piquées dans un livre, il parle comme un gosse restituant un mot fraîchement appris. La liberté enfermée, cadenas autour des griffes. Reconstruit à partir d'images piquées dans des journaux, se réadapter à la société. Et lui, qui se tient avec presque de l'insolence, impassible. Comme-ci il savait.
(c) AMIANTE
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Sujet: Re: (nehemiah) folie douce Lun 16 Mai - 15:15
folie douce
Il ne compte plus les années à le chercher, le demander. L’unique à ses yeux. Le seul à échapper aux vices pour le posséder. Le clan possédé, les corps parfaitement placés et le massacre de plus. Les corps à tuer. La honte pour les chasseurs. Que cette envie de carmin, que cette envie de laisser les doigts plonger dans le pourpre. Lui. Lui pour obséder la moindre parcelle du crâne, lui pour avoir trahis l’amour qu’il pouvait lui porter. Cet amour qu’il ne sait pas donner. Il aurait dû rester, partager cette fascination, cette attraction, mais il a filé entre les doigts et Hasan ne crève que de le retrouver pour le briser. Terminer la lignée de ce clan maudit. Tuer la bête qui sommeille en lui. Pas le droit de s’enfuir. Pas le droit de lui échapper. Pas le droit de ne pas l’aimer en retour. Cet amour déviant. Cet amour indécent.
L’ombre qu’il aperçoit du coin de l’œil alors que les billes sombres se détachent des tableaux pour se tourner vers le monstre. La voix qui résonne au crâne et les muscles qui se tendent dans le corps. Cette envie de se jeter sur lui. Cette envie de lui arracher la vie, de lui demander pourquoi il est parti. La réaction trop faible. La rage qu’il devrait voir dans ses yeux à lui, mais qu’un voile de souvenir disparu pour bloquer la vue. « Vous ne devriez pas être là. » La mélodie de la voix pour lui manquer. Il ne bouge pas le colosse. Il ne bouge pas le monstre. Il se contente de regarder, d’attendre. Pas de réponse qu’il offre. Les mots qu’il pèse. Le loup qui ne semble pas réagir, le loup qui a du effacer la moindre trace des souvenirs du crâne. Une page blanche. Un vide qu’il pourrait combler. Jouer avec les souvenirs pour le torturer. « Je vais appeler la police. » Il ne bouge pas encore. Les yeux qui cherchent le téléphone pour le subtiliser, pour le briser. Les pas qui claquent et la lumière au visage qui fait plisser les yeux. La noirceur pour compagne. Il préfère. Les doigts s’enroulent autour du poignet pour repousser la main, pour que la lumière se perde dans le vide. « Je vous laisse une chance de vous expliquer. » Les doigts qui crèvent de rester contre la peau, les mots qu’il retient depuis tantôt. Il se lève. Les doigts qui s’emparent du téléphone, de la radio, de ce qui pourrait le séparer de son jouet pas la soirée. Il n’a pas envie d’invités pour venir le déranger. L’objet qu’il envoie valser sur le plancher et qu’il repousse du pied. Plus loin. Plus là. Les yeux qui se braquent dans les siens, les yeux qui détaillent la moindre parcelle du visage. Le colosse qui dépasse. Le colosse qui regarde. Le tueur qui demande le sang, mais cette incapacité à le briser comme les autres. Lui. Lui sa foutue obsession. « Je te cherchais.» Les mots qui tranchent dans le vide alors qu’il les envoie valser pour les écraser au visage du loup. Lui le prédateur. Lui pour chercher les monstres afin de les éliminer, de les rayer de la surface de la Terre. « Je suis déçu.» Sourire carnassier qui étire les lèvres, qui déforme le visage dément. « Tu ne sembles pas te souvenir de moi.» Le jeu qu’il a envie d’instaurer, la peur qu’il aime laisser planer et cette impression d’en savoir plus sur l’autre. La pulpe des doigts qui effleurent le visage un moment. La dernière pièce de la folie. Celui pour échapper au crime qu’il a trop souvent commis. Celui qu’il méprise de faire ressentir cette incapacité, cette envie de ne pas tuer et de garder près de lui. Mais le prédateur blessé, abandonné. Il ne sait pas pardonner.